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540 ŒUVRES COMPLÈTES DE BUFFON.

et ne peut s’appliquer à la lavandière, de laquelle nous ne trouvons ni le nom ni la description dans les auteurs grecs.

Elle n’est guère plus grosse que la mésange commune, mais sa longue queue semble agrandir son corps, et lui donne en tout sept pouces de lon- gueur ; la queue elle-même en a trois et demi, l’oiseau l’épanouit et l’étale en volant ; il s’appuie sur cette longue et large rame qui lui sert pour se balancer, pour pirouetter, s’élancer, rebrousser et se jouer dans le vague de l’air ; et, lorsqu’il est posé, il donne incessamment à cette même partie un balancement assez vif de bas en haut, par reprises de cinq ou six secousses.

Ces oiseaux courent légèrement, à petits pas très prestes, sur la grève des rivages ; ils entrent même au moyen de leurs longues jambes à la pro- fondeur de quelques lignes dans l’eau de la lame affaiblie, qui vient s’épandre sur la rive basse en un léger réseau ; mais plus souvent on les voit voltiger sur les écluses des moulins et se poser sur les pierres ; ils y viennent, pour ainsi dire, battre la lessive avec les laveuses, tournant tout le jour à l’entour de ces femmes, s’en approchant familièrement, recueillant les miettes que parfois elles leur jettent, et semblant imiter du battement de leur queue celui qu’elles font pour battre leur linge (a) : habitude qui a fait donner à cet oiseau le nom de lavandière.

Le blanc et le noir, jetés par masses et par grandes taches, partagent le plumage de la lavandière ; le ventre est blanc ; la queue est composée de douze pennes, dont les dix intermédiaires sont noires, les deux latérales blanches jusqu’auprès de leur naissance : l’aile pliée n’atteint qu’au tiers de leur longueur ; les pennes des ailes sont noirâtres et bordées de gris blanc. Belon remarque à la lavandière un petit rapport dans les ailes, qui l’approche du genre des oiseaux d’eau (b). Le dessus de la tête est couvert d’une calotte noire qui descend sur le haut du cou ; un demi-masque blanc cache le front, enveloppe l’œil, et, tombant sur les côtés du cou, confine avec le noir de la gorge, qui est garnie d’un large plastron noir arrondi sur la poitrine. Plusieurs individus, tels que celui qui est représenté, fig. 2 de la planche enluminée, n° 652, n’ont de ce plastron noir qu’une zone en demi-cercle au haut de la poitrine, et leur gorge est blanche ; le dos, gris ardoisé dans les autres, est gris brun dans ces individus qui paraissent martii. » Gessner, p. 593. Et Aldrovande, relevant l’erreur qui faisait du cnipologos une lavandière, pense qu’Aristote désigne par ce nom le plus petit des pics ou le grimpereau. De Avib., t. II, p. 726.

(a) « La lavandière tient cette appellation françoise pour ce qu’elle est fort familière aux ruisseaux, où elle remue toujours sa queue en hochant le derrière, comme une lavandière qui bat ses drapeaux. » Belon, Nat. des Oiseaux, p. 349.

(b) « Elle a une enseigne particulière, par laquelle on la voit ensuivre les oiseaux de rivière, c’est qu’elle a les dernières plumes de ses aeles, joignant le corps, aussi longues que les premières du devant, lesquelles on trouve aussi en tous autres oyseaux qui vivent de mouches et de vermes de terre, pluviers et vanneaux. » Belon, Nat. des Oiseaux, p. 349.