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534 ŒUVRES COMPLÈTES DE BUFFON.

On pourrait le reconnaître par les seuls noms qui lui ont été donnés en divers lieux : on l’appelle dans nos provinces motteux, tourne-motte, brise- motte et terrasson, de ses habitudes de se tenir toujours à terre et d’en habiter les trous, de se poser sur les mottes, et de paraître les frapper en secouant sa queue. Les noms qu’on lui donne en Angleterre désignent éga- lement un oiseau des terres labourées et des friches, et un oiseau à croupion blanc (a) mais le nom grec œnanthe, que les naturalistes, d’après la con- jecture de Belon, ont voulu unanimement lui appliquer, n’est pas aussi caractéristique ni aussi approprié que les précédents. La seule analogie du mot œnanthe à celui de vitiflora, et de celui-ci à son ancien nom vitrec, a déterminé Belon à lui appliquer celui d’œnanthe (b), car cet auteur ne nous explique pas pourquoi ni comment on l’a dénommé oiseau de fleur de vigne (œnanthe). Il arrive d’ailleurs avant le temps de cette floraison de la vigne, il reste longtemps après que la fleur est passée ; il n’a donc rien de commun avec cette fleur de la vigne. Aristote ne caractérise l’oiseau œnanthe qu’en donnant à son apparition et à son départ les mêmes temps qu’à l’arrivée et à l’occultation du coucou (c).

M. Brisson compte cinq espèces de ces oiseaux : 1° le cul-blanc (*) ; 2° le cul-blanc gris (**), qu’il ne distingue de l’autre que par cette épithète, quoi- que le premier soit également gris ; la différence prise d’après M. Linnæus, qui en fait une espèce particulière (d), consiste en ce qu’il a de petites ondes de blanchâtre à travers le gris teint de fauve qui les couvre également tous deux. M. Brisson ajoute une autre petite différence dans les plumes de la poitrine, qui sont, dit-il, piquetées de petites taches grises ; et dans celles de la queue, dont les deux du milieu n’ont point de blanc, quoique les autres en aient jusqu’aux trois quarts ; mais les détails minutieux de ces petites nuances de couleurs feraient aisément plusieurs espèces d’un seul et même

(a) Wheat-ear, fallow-smiter, white-tail.

(b) « Si ce n’eust esté que l’avons veu voler par-dessus les buissons de Crète, n’eussions osé l’affermer avoir quelque nom ancien, et de fait ne lui en trouvons aucun plus conve- nable que de le nommer en grec œnanthe, que Gaza tourne en latin vitiflora, qui est ap- pellation conforme à ce que les français le dient un vitrec. » Belon, Nat. des oiseaux, page 352.

(e) « Cuculus immutatur colore et vocem nimis explanat, cùm se abditurus est, quod facere exortu caniculæ solet ; apparere autem incipit ab ineunte vere ad ejus syderis ortum. Ab- ditur et ea quam œnantham quidem appellant, ac si vitifloram dixeris, exortu ejusdem syderis, occasu vero apparet. Vitat enim interdum frigora, alias æstum. » Aristote, Hist. animal., lib. ix, cap. xlix. Pline parle de même de l’occultation de l’œnanthe (lib. x, cap. xxix). Et le P. Hardouin sur ce passage est si éloigné de croire que le cul-blanc soit l’œnanthe, qu’il pense que c’est un oiseau de nuit.

(d) « Motacilla pectore abdomineque pallido, rectricibus exteriùs albis, dorso undulato. » Fauna Suecica, n° 219. — « Motacilla subtus pallida, rectricibus introrsum albis, dorso un- dulato. » Linnæus, Syst. nat., édit. X. gen. 99, sp. 17, variet. 1.

(*) C’est un jeune Motteux mâle.

(**) C’est une jeune femelle du Motteux, après la mue.