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LE MOTTEUX. 533

plumes, comme il arrive aux couveuses ardentes ; le mâle affectionné à cette mère tendre, lui porte pendant qu’elle couve des fourmis et des mouches ; il se tient aux environs du nid, et lorsqu’il voit un passant il court ou vole devant lui, faisant de petites poses comme pour l’attirer, et quand il le voit assez éloigné il prend sa volée en cercle et regagne le nid.

On en voit des petits dès le milieu de mai, car ces oiseaux, dans nos pro- vinces, sont de retour dès les premiers beaux jours vers la fin de mars (a) ; mais s’il survient des gelées après leur arrivée ils périssent en grand nombre, comme il arriva en Lorraine en 1767 (b) ; on en voit beaucoup dans cette province, surtout dans la partie montagneuse ; ils sont également communs en Bourgogne et en Bugey, mais en Brie on n’en voit guère que sur la fin de l’été (c) : en général, ils préfèrent les pays élevés, les plaines en montagnes et les endroits arides. On en prend grand nombre sur les dunes, dans la province de Sussex, vers le commencement de l’automne, temps auquel cet oiseau est gras et d’un goût délicat : Willughby décrit celte petite chasse que font dans ces cantons les bergers d’Angleterre (d) ; ils coupent des gazons et les couchent en long à côté et au-dessus du creux qui reste en place du gazon enlevé, de manière à ne laisser qu’une petite tranchée, au milieu de laquelle est tendu un lacet de crin. L’oiseau entraîné par le double motif de chercher sa nourriture dans une terre fraîchement ouverte, et de se cacher dans la tranchée, va donner dans ce piège ; l’apparition d’un éper- vier et même l’ombre d’un nuage suffit pour l’y précipiter, car on a remar- qué que cet oiseau timide fuit alors et cherche à se cacher (e).

Tous s’en retournent en août et septembre, et l’on n’en voit plus dès la fin de ce mois ; ils voyagent par petites troupes, et du reste ils sont assez solitaires ; il n’existe entre eux de société que celle du mâle et de la femelle. Cet oiseau a l’aile grande (f), et quoique nous ne lui voyions pas faire beaucoup d’usage de sa puissance de vol, apparemment qu’il l’exerce mieux dans ses migrations ; il faut même qu’il l’ait déployée quelquefois, puisqu’il est du petit nombre des oiseaux communs à l’Europe et l’Asie méridionale, car on le trouve au Bengale (g), et nous le voyons en Europe depuis l’Italie (h) jusqu’en Suède (i).

(a) M. Lottinger.

(b) Idem.

(c) M. Hébert.

(d) Ornithologie, p. 168.

(e) Albin, t. Ier, p. 49.

(f) M. Brisson dit que la première des pennes de l’aile est extrêmement courte ; mais la plume qu’il prend pour la première des grandes pennes n’est que la première des grandes couvertures, implantées sous la première penne et non à côté.

(g) Edwards, préface, p. 12. Wheat-ear.

(h) « Quæ culo bianco apud nos appellatur prorsus quidem descriptioni Bellonii corres- pondet. » Aldrovande, Avi., t. II, p. 762. — « Italis circa Ferrariam avis quædam culo bianco appellatur vulgo, quæ vermibus, muscis, et aliis insectis vescitur, ut audio, et degit in agris prociscis. » Gessner, p. 604.

(i) Linnæus, Fauna Suecica, n° 217.