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LA GORGE-BLEUE. 517

que par le bleu brillant et azuré qui couvre sa gorge, au lieu que celle de l’autre est d’un rouge orangé ; il paraît même que la nature ait voulu démon- trer l’analogie entre ces deux oiseaux jusque dans leurs différences ; car au-dessous de cette plaque bleue on voit un cintre noir et une zone d’un rouge orangé qui surmonte le haut de la poitrine : cette couleur orangée reparaît encore sur la première moitié des pennes latérales de la queue ; de l’angle du bec passe par l’œil un trait de blanc roussâtre : du reste, les cou- leurs, quoique un peu plus sombres, sont les mêmes dans la gorge-bleue et dans le rouge-gorge. Elle en partage aussi la manière de vivre ; mais en rapprochant ces deux oiseaux par les ressemblances, la nature semble les avoir séparés d’habitation ; le rouge-gorge demeure au fond des bois, la gorge-bleue se tient à leurs lisières, cherchant les marais, les prés humides, les oseraies et les roseaux ; et avec le même instinct solitaire que le rouge- gorge, elle semble avoir pour l’homme le même sentiment de familiarité, car après toute la belle saison passée dans ces lieux reculés, au bord des bois voisins des marécages, ces oiseaux viennent, avant leur départ, dans les jardins, dans les avenues, sur les haies, et se laissent approcher assez pour qu’on puisse les tirer à la sarbacane.

Ils ne vont point en troupes, non plus que les rouges-gorges, et on en voit rarement plus de deux ensemble. Dès la fin de l’été, les gorges-bleues se jettent, dit M. Lottinger, dans les champs semés de gros grains ; Frisch nomme les champs de pois comme ceux où elles se tiennent de préférence, et prétend même qu’elles y nichent ; mais on trouve plus communément leur nid sur les saules, les osiers et les autres arbustes qui bordent les lieux humides ; il est construit d’herbes entrelacées à l’origine des branches ou des rameaux.

Dans le temps des amours, le mâle s’élève droit en l’air, d’un petit vol, en chantant ; il pirouette et retombe sur son rameau avec autant de gaieté que la fauvette, dont la gorge-bleue paraît avoir quelques habitudes ; elle chante

Avi., p. 796, avec une figure méconnaissable, idem. Icon. avi., p. 51. — Aldrovande, t. II, p. 749, avec la figure copiée de Gessner. — Willughby, Ornithol., p. 160. — Ruticilla weg- flecklin. Ray, Synops. Avi., p. 78, n° a, 5. — Rossignol de mur ou rouge-queue à gorge bleue. Edwards, t. Ier, p. 28, avec une figure exacte de la femelle que Klein désigne, p. 80, n° 24 de l’Ordo avium, sous le nom de Sylvia seu ruticilla gutture albo, zona cæruleâ fim- briato.—« Ficedula supernè cinereo fusca, infernè sordidè griseo-rufescens ; tæniâ supra ocu-

los sordidè albo-rufescente ; collo inferiore splendidè cæruleo maculâ in medio argentatâ insignito ; tæniâ transversâ in pectore nigrâ ; rectricibus binis intermediis in medio fusco ni- gricantibus, » circa margines griseis, lateralibus in exortu rufis, in apice nigricantibus. » Cyanecula. Brisson, Ornithol., t. III, p. 413 et p. 416. La femelle donnée sous le nom de gorge-bleue de Gibraltar est désignée par la phrase suivante : « Ficedula supernè fusca, marginibus pennarum dilutioribus, infernè alba, tæniâ infra oculos dilutè cærulea ; collo inferiore tæniâ transversâ lunulatâ cæruleâ issignito : rectricibus binis intermediis obscurè fuscis, lateralibus in exortu rufis, in apice nigricantibus. » Cyanecula Gibraltariensis. — Le gorge-bleue se nomme en latin moderne, cyanecula ; en allemand, wegflecklin, suivant Gessner ; blau-kelein, selon Klein et Frisch ; en suédois, carls-vogel, Linnæus.