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LE ROUGE-QUEUE. 503

laïs (la fauvette babillarde), etc. (a) : or, je demande si l’on peut ranger le bouvreuil au nombre de ces oiseaux à bec effilé, et qui ne vivent en tout ou en grande partie que d’insectes ? Cet oiseau est, au contraire, un des plus décidément granivores ; il s’abstient de toucher aux insectes dans la saison où la plupart des autres en font leur pâture, et paraît aussi éloigné de cet appétit par son instinct qu’il l’est par la forme de son bec, différente de celle de tous les oiseaux en qui l’on remarque ce genre de vie. On ne peut supposer qu’Aristote ait ignoré cette différence dans la manière de se nourrir, puisque c’est sur cette différence même qu’il se fonde en cet endroit ; par conséquent ce n’est pas le bouvreuil qu’il a voulu désigner par le nom de pyrrhulas.

Quel est donc l’oiseau, placé entre le rouge-gorge et la fauvette, autre néanmoins que le rossignol de muraille, auquel puissent convenir à la fois ces caractères d’être à bec effilé, de vivre principalement d’insectes, et d’avoir quelque partie remarquable du plumage d’un roux de feu ou rouge fauve ? je ne vois que celui qu’on a nommé rouge-queue, qui habite les bois avec le rouge-gorge, qui vit d’insectes comme lui pendant tout l’été, et part en même temps à l’automne. Wuotton (b) s’est aperçu que le pyrrhulas doit être une espèce de rouge-queue. Jonston paraît faire la même remarque (c) ; mais le premier se trompe en disant que cet oiseau est le même que le rossi- gnol de muraille, puisque Aristote le distingue très nettement dans la même phrase.

Le rouge-queue est en effet très différend du rossignol de muraille : Aldro- vande et Gessner l’ont bien connu en l’en séparant (d). Le rouge-queue est plus grand, il ne s’approche pas des maisons et ne niche pas dans les murs, mais dans les bois et buissons comme les bec-figues et les fauvettes ; il a la

passage où Aristote nomme le melancoryphos, que Gaza traduit atricapilla, est au livre ix, chap. xv ; et c’est celui que Belon applique au bouvreuil (Nat. des Oiseaux, p. 359) ; mais il est clair que l’atricapilla qui pond vingt œufs, qui niche dans les trous d’arbres, et se nourrit d’insectes (Aristote, loco citato) n’est point le bouvreuil, et ne peut être que la petite mé- sange à tête noire ou nonnette, tout comme Y atricapilla qui se trouve pour accompagner le rouge-gorge, le rossignol de muraille et le bec-figue, ne peut être que la fauvette à tête noire. Cette petite discussion nous a paru d’autant plus nécessaire, que Belon est de tous les natu- ralistes celui qui a rapporté généralement avec plus de sagacité les dénominations anciennes aux espèces connues des modernes, et que d’un autre côté la nomenclature du bouvreuil est une de celles qui sont demeurées remplies de plus d’obscurité et de méprises (voyez l’histoire du bec-figue), et qui jetaient le plus d’embarras sur celle de plusieurs autres oiseaux, et en particulier du rouge-queue.

(a) « Hæ et reliqua id genus, vermiculis partim ex toto, partira magnâ ex parte aluntur. » Lib. viii, cap. iii.

(b) Apud Gessnerum, p. 701. « Phyrrhulas eadem videtur quæ phœnicurus : quamquam Theodorus rubicillam interpretetur, si cui secùs videatur, non contendo. » Wuothonus.

(c) Phyrrhulas. Jonston, Avi., pl. 45.

(d) Gessner lui donne le nom caractéristique de rotschwentzel. Aldrovande en fait un se- cond rouge-queue (le rossignol de muraille est le premier) sous le nom de phœnicurus alter, et tous deux le décrivent de manière à le distinguer clairement du rossignol de muraille. •Gessner, Avi., p. 700. Aldrovande, t. II, p. 71 S.