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462 ŒUVRES COMPLÈTES DE BUFFON.

Suède et en Sibérie (a), où ils chantent très agréablement ; mais en Europe comme en Asie, il y a des contrées qui ne leur conviennent point, et où ils ne s’arrêtent jamais ; par exemple, le Bugey jusqu’à la hauteur de Nantua, une partie de la Hollande, l’Écosse, l’Irlande (b) ; la partie nord du pays de Galles et même de toute l’Angleterre, excepté la province d’York ; le pays des Dauliens aux environs de Delphes, le royaume de Siam, etc. (c). Partout ils sont connus pour des oiseaux voyageurs, et cette habitude innée est si forte en eux, que ceux que l’on tient en cage s’agitent beaucoup au printemps et en automne, surtout la nuit, aux époques ordinaires marquées pour leurs migrations : il faut donc que cet instinct qui les porte à voyager soit indé- pendant de celui qui les porte à éviter le grand froid et à chercher un pays où ils puissent trouver une nourriture convenable ; car dans la cage ils n’éprouvent ni froid ni disette, et cependant ils s’agitent.

Cet oiseau appartient à l’ancien continent, et quoique les missionnaires et les voyageurs parlent du rossignol du Canada, de celui de la Louisiane, de celui des Antilles, etc., on sait que ce dernier est une espèce de moqueur, que celui de la Louisiane est le même que celui des Antilles, puisque, selon le Page Dupratz, il se trouve à la Martinique et à la Guadeloupe ; et l’on voit, par ce que dit le P. Charlevoix de celui du Canada, ou que ce n’est point un rossignol, ou que c’est un rossignol dégénéré (d). Il est possible en effet que cet oiseau, qui fréquente les parties septentrionales de l’Europe et de l’Asie, ait franchi les mers étroites, qui, à cette hauteur, séparent les deux conti- nents, ou qu’il ait été porté dans le nouveau par un coup de vent ou par quelque navire, et que trouvant le climat peu favorable, soit à cause des grands froids, soit à cause de l’humidité ou du défaut de nourriture (e), il chante moins bien au nord de l’Amérique qu’en Asie et en Europe, de même qu’il chante moins bien en Écosse qu’en Italie (f) ; car c’est une règle géné-

quante-sept sous de France, et les vingt cobangs près de cent louis. Les rossignols étaient bien plus chers à Rome, comme nous le verrons à l’article du rossignol blanc.

(a) M. Gmelin parle avec transport des rives agréables du ruisseau de Sibérie, appelé Beressouka, et du ramage des oiseaux qui s’y font entendre, parmi lesquels le rossignol tient le premier rang. Voyage de Sibérie, t. Ier, p. 112.

(b) Voyez Aldrovande, t. II, p. 784. Je sais qu’on a douté de ce qui regarde l’Irlande, l’Écosse et la Hollande, mais ces assertions ne doivent pas être prises à la rigueur, elles si- gnifient seulement que les rossignols sont fort rares dans ces pays ; ils doivent l’être en effet partout où il y a peu de bois et de buissons, peu de chaleur, peu d’insectes, peu de belles nuits, etc.

(c) Voyages de Struys, t. Ier, p. 53.

(d) « Le rossignol de Canada, dit ce missionnaire, est à peu près le même que le nôtre par la figure, mais il n’a que la moitié de son chant. » Nouvelle-France, t. III, p. 157.

(e) Je sais qu’il y a beaucoup d’insectes en Amérique, mais la plupart sont si gros et si bien armés, que le rossignol, loin d’en pouvoir faire sa proie, aurait souvent peine à se dé- fendre contre leurs attaques.

(f) Voyez Aldrovande, Ornithol., t. II, p. 785, où il cite Petrus Apponensis. Cet oiseau paraît donc quelquefois en Écosse.