Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome VI.djvu/478

Cette page n’a pas encore été corrigée

452 ŒUVRES COMPLÈTES DE BUFFON.

du rossignol : les alouettes, le serin, le pinson, les fauvettes, la linotte, le chardonneret, le merle commun, le merle solitaire, le moqueur d’Amérique, se font écouter avec plaisir (a) lorsque le rossignol se tait : les uns ont d’aussi beaux sons, les autres ont le timbre aussi pur et plus doux ; d’autres ont des tours de gosier aussi flatteurs ; mais il n’en est pas un seul que le rossignol n’efface pas la réunion complète de ces talents divers ; et par la prodigieuse variété de son ramage ; en sorte que la chanson de chacun de ces oiseaux, prise dans toute son étendue, n’est qu’un couplet de celle du rossignol : le rossignol charme toujours et ne se répète jamais, du moins jamais servilement ; s’il redit quelque passage, ce passage est animé d’un accent nouveau, embelli par de nouveaux agréments ; il réussit dans tous les genres ; il rend toutes les expressions, il saisit tous les caractères, et de plus il sait en augmenter l’effet par les contrastes. Ce coryphée du printemps se prépare-t-il à chanter l’hymne de la nature, il commence par un prélude timide, par des tons faibles, presque indécis, comme s’il voulait essayer son instrument et intéresser ceux qui l’écoutent (b) ; mais ensuite prenant de l’assurance, il s’anime par degrés, il s’échauffe, et bientôt il déploie dans leur plénitude toutes les ressources de son incomparable organe : coups de gosier éclatants, batteries vives et légères ; fusées de chant, où la netteté

tana ; en allemand, kleine nachtigal ; parmi les oiseleurs, doerling. Rzaczynski, Auctuar. Polon., p. 391. — Ædon, acredula, idem. Hist. nat. Polon., p. 286. — Motacilla rufo-ci- nerea, armillis, seu genuum annulis cinereis ; en suédois, naecktergahl. Linnæus, Fauna Suecica, n° 214. Syst. nat., édit. XIII, p. 328, n° 114. — En danois, nattergal. Muller, Zoologiæ Dan. prodrom., p. 32, n° 265. — En autrichien, au-vogel, auen-nachtigal. Kramer, Elench. Austr. inf., p. 375. — Luscina ficedula tota fulva, canora ; en catalan, rossinyol. Barrère, Specim. nov., p. 42, g. 18, sp. 5. — En allemand, roth-vogel. Frisch, t. Ier, class. 2. div. 5. pl. 1, n° 21. — En allemand, doerling, tagschlaeger, wedel schwantz. Klein, Ordo avium, p. 73. — The nightingale (chantre de nuit), du mot anglais night (nuit), et du saxon, galan (chanter). British Zoology, p. 100. — Le rossignol franc, rossignol chanteur, rossi- gnol des bois ; en Provence, roussignol ou roussigneau ; la femelle, roussignolette, le jeune, rossignolet. Salerne, Hist. nat. des oiseaux, p. 230.

(a) J’ai eu occasion, dit M. Daines Barrington, d’entendre un moqueur d’Amérique qui chantait parfaitement... Dans l’espace d’une minute il imitait le cujelier, le pinson, le merle, la grive et le moineau ; on me dit même qu’il aboyait comme un chien ; en sorte que cet oiseau parait porté à imiter tout sans discernement et sans choix : cependant il faut avouer que le timbre de sa voix approche plus du timbre de la voix du rossignol que celui d’aucun autre oiseau que j’aie entendu. A l’égard du chant naturel de cet oiseau, le voyageur Kalm prétend qu’il est admirable (t. Ier, p. 219) ; mais ce voyageur n’a pas fait en Amérique un séjour assez long pour connaître exactement ce chant naturel, et à mon avis les imitateurs ne réussissent jamais bien que dans l’imitation. Je ne nierais pas cependant que le chant propre du moqueur pût égaler celui du rossignol, mais on conviendra que l’attention qu’il donne à toutes sortes de chants étrangers, à toutes sortes de bruits, même désagréables, ne peut qu’altérer et gâter son ramage naturel. Voyez Transactions philosophiques, vol. LXIII, part. n.

(b) J’ai souvent remarqué, dit M. Barrington, que mon rossignol, qui était un excellent chanteur, commençait sa chanson par des tons radoucis, comme avaient coutume de faire les anciens orateurs, et qu’il ménageait ses poumons pour renforcer sa voix à propos, et avec tout l’art des gradations.