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414 ŒUVRES COMPLÈTES DE BUFFON.

quoiqu’elle se soutienne au haut des airs et à perte de vue, on l’entend encore distinctement, soit que ce chant ne soit qu’un simple accent d’amour ou de gaieté, soit que ces petits oiseaux ne chantent ainsi en volant que par une sorte d’émulation et pour se rappeler entre eux. Un oiseau de proie qui compte sur sa force et médite le carnage doit aller seul, et garder dans sa marche un silence farouche, de peur que le moindre cri ne fût pour ses pareils un avertissement de venir partager sa proie, et pour les oiseaux faibles un signal de se tenir sur leurs gardes ; c’est à ceux-ci à se rassem- bler, à s’avertir, à s’appuyer les uns les autres, et à se rendre, ou du moins à se croire forts par leur réunion. Au reste l’alouette hante rarement à terre, où néanmoins elle se tient toujours lorsqu’elle ne vole point ; car elle ne se perche jamais sur les arbres, et on doit la compter parmi les oiseaux pulvérateurs (a) : aussi ceux qui la tiennent en cage ont-ils grand soin d’y mettre dans un coin une couche assez épaisse de sablon où elle puisse se poudrer à son aise et trouver du soulagement contre la vermine qui la tour- mente ; ils y ajoutent du gazon frais souvent renouvelé, et ils ont l’attention que la cage soit un peu spacieuse.

On a dit que ces oiseaux avaient de l’antipathie pour certaines constella- tions, par exemple, pour Arcturus, et qu’ils se taisaient lorsque cette étoile commençait à se lever en même temps que le soleil (b) ; apparemment que c’est dans ce temps qu’ils entrent en mue, et sans doute ils y entreraient toujours quand Arcturus ne se lèverait pas.

Je ne m’arrêterai point à décrire un oiseau aussi connu ; je remarquerai seulement que ses principaux attributs sont d’avoir le doigt du milieu étroi- ment uni avec le plus extérieur de chaque pied par sa première phalange ; l’ongle du doigt postérieur fort long et presque droit ; les ongles antérieurs très courts et peu recourbés ; le bec point trop faible, quoique en alène ; la langue assez large, dure et fourchue ; les narines rondes et à demi décou- vertes ; l’estomac charnu et assez ample relativement au volume du corps ; le foie partagé en deux lobes fort inégaux, le lobe gauche paraissant avoir été gêné et arrêté dans son accroissement par le volume de l’estomac ; en- viron neuf pouces de tube intestinal ; deux très petits cæcums communi- quant à l’intestin ; une vésicule du fiel ; le fond des plumes noirâtre, douze pennes à la queue et dix-huit aux ailes, dont les moyennes ont le bout coupé presque carrément et partagé dans son milieu par un angle rentrant, carac- tère commun à toutes les alouettes (c). J’ajouterai encore que les mâles sont un peu plus bruns que les femelles (d), qu’ils ont un collier noir, plus de

(a) Aristote, Hist. animal., lib. ix, cap. xlix.

(b) Anton. Mizaldus apud Aldrov. Ornithol., t. II, p. 834.

(c) Voyez l’ornithologie de Brisson, t. II, p. 335 et suiv. Whilughby, Ornithologie, p. 149.

(d) Frisch, pl. 15. Aldrovande : il m’a paru que les alouettes ou mauviettes de Beauce,