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OISEAUX ÉTRANGERS, ETC. 409

mêlé cet oiseau de deux genres différents en lui donnant l’appétit et les formes de l’un avec le bec d’un autre, nous le placerons à la suite des gobe- mouches, comme une de ces espèces anomales que des yeux, libres de pré- vention de nomenclature, aperçoivent aux confins de presque tous les genres. Voici la description qu’en donne Catesby : « Il est environ de la « grosseur d’un moineau ; il a de grands yeux noirs ; son bec est épais, grossier et jaunâtre : tout l’oiseau est d’un beau rouge, excepté les franges intérieures des plumes de l’aile, qui sont brunes ; mais ces franges ne paraissent que quand les ailes sont étendues : c’est un oiseau de passage qui quitte la Caroline et la Virginie en hiver ; la femelle est brune avec une nuance de jaune. » Edwards décrit le même oiseau (Glan., page 63, planche 239), et lui reconnaît le bec des granivores, mais plus allongé. « Je pense, ajoute-

t-il, que Catesby a découvert que ces oiseaux se nourrissent de mouches, puisqu’il leur a donné le nom latin de muscicapa rubra. »

III. — LE DRONGO (a).

Quoique les nomenclateurs aient placé cet oiseau (*) à la suite des gobe- mouches, il paraît en différer par de si grands caractères, aussi bien que des moucherolles, que nous avons cru devoir totalement l’en séparer, et lui conserver le nom de drongo qu’il porte à Madagascar. Ces caractères sont : 1° la grosseur, étant aussi grand que le merle, et plus épais ; 2° la huppe sur l’origine du bec ; 3° le bec moins aplati ; 4° le tarse et les doigts bien plus robustes : tout son plumage est d’un noir changeant en vert ; immédiate- ment sur la racine du demi-bec supérieur s’élèvent droit de longues plumes très étroites qui ont jusqu’à un pouce huit lignes de hauteur ; elles se cour- bent en devant et lui font une sorte de huppe fort singulière : les deux plumes extérieures de la queue dépassent les deux du milieu d’un pouce sept lignes, les autres étant de grandeur intermédiaire se courbent en dehors, ce qui rend la queue très fourchue. M. Commerson assure que le drongo a un beau ramage, qu’il compare au chant du rossignol, ce qui marque une grande différence entre cet oiseau et les tyrans, qui n’ont tous que des cris aigres, et qui d’ailleurs sont indigènes en Amérique. Ce drongo a première- ment été apporté de Madagascar par M. Poivre ; on l’a aussi apporté du cap de Bonne-Espérance et de la Chine ; nous avons remarqué que la huppe manque à quelques-uns, et nous ne doutons pas que l’oiseau envoyé au Cabinet du Roi sous le nom de gobe-mouche à queue fourchue de la Chine, ne soit un individu de cette espèce, et c’est peut-être la femelle ; la ressem-

(a) « Muscicapa cristata nigro viridens ; remigibus rectricibusque nigris, oris exterioribus nigro viridescentibus ; caudâ bifurcâ ; cristâ in syncipite perpendiculariter erectâ, » le grand gobe-mouche noir huppé de Madagascar. Brisson, Ornithol., t. II, p. 388.

(*) Lanius forficatus Gmel.