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LES TITIRIS OU PIPIRIS. 401

telet : ici cette dénomination a été donnée non seulement à la tête huppée ou couronnée, mais encore au naturel qui commence à devenir sanguinaire : triste marque de la misère de l’homme, qui a toujours joint l’idée de la cruauté à l’emblème du pouvoir ! Nous eussions donc changé ce nom affli- geant et absurde, s’il ne s’était trouvé trop établi chez les naturalistes ; et ce n’est pas la première fois que nous avons laissé, malgré nous, le tableau de la nature défiguré par ces dénominations trop disparates, mais trop géné- ralement adoptées.

Nous laisserons donc le nom de tyrans à des oiseaux du nouveau conti- nent, qui ont, avec les gobe-mouches et les moucherolles, le rapport de la même manière de vivre, mais qui en diffèrent, comme étant plus gros, plus forts et plus méchants : ils ont le bec plus grand et plus robuste, aussi leur naturel, plus dur et plus sauvage, les rend audacieux, querelleurs, et les rapproche des pies-grièches, auxquelles ils ressemblent encore par la gran- deur du corps et la forme du bec.

LES TITIRIS OU PIPIRIS (a)

PREMIÈRE ET SECONDE ESPÈCE.

La première espèce des tyrans est le titiri ou pipiri (*) : il a la taille et la force de la pie-grièche grise, huit pouces de longueur, treize pouces de vol ; le bec aplati, mais épais, long de treize lignes, hérissé de moustaches, et droit jusqu’à la pointe où se forme un crochet plus fort que ne l’exprime la figure ; la langue est aiguë et cartilagineuse ; les plumes du sommet de la tête, jaunes à la racine, sont terminées par une moucheture noirâtre qui en couvre le reste lorsqu’elles sont couchées ; mais quand, dans la colère, l’oi- seau les relève, sa tête paraît alors comme couronnée d’une large huppe du plus beau jaune : un gris brun clair couvre le dos, et vient se fondre aux côtés du cou avec le gris blanc ardoisé du devant et du dessous du corps ; les pennes brunes de l’aile et de la queue sont bordées d’un filet roussâtre.

La femelle, dans cette espèce, a aussi sur la tête la tache jaune, mais

et la tête sont exactement les mêmes, et l’oiseau est parfaitement reconnaissable. Ray a dé- crit celui-ci (Synops., p. 195) ; et un autre (p. 193, tab. 2, n° 13), mais la figure est mau- vaise et la description incomplète.

(a) Muscicapa supernè griseo-fusca, infernè alba, pectore cinereo albo ; capite superiùs nigricante, pennis verticis in exortu luteis, rectricibus fuscis, marginibus rufis, » le tyran. Brisson, Ornithol., t. II, p. 391. — « Lanius vertice nigro : striâ longitudinali fulvâ. » Tyran- nus. Linnæus, Syst. nat., édit X, gen. 43, sp. 4. — « Pica Americana cristata. » Frisch., avec une fig., pl. 62.

(*) Tyrannus intrepidus et Tyrannus matutinus Vieill.