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392 ŒUVRES COMPLÈTES DE BUFFON.

utiles ; ils infectent de leurs excréments ou de leurs œufs toutes les denrées que l’on veut conserver : ainsi les oiseaux bienfaisants qui détruisent ces insectes ne sont pas encore assez nombreux dans les climats chauds, où néanmoins les espèces en sont très multipliées. Et dans nos pays tempérés, pourquoi sommes-nous plus tourmentés des mouches au commencement de l’automne qu’au milieu de l’été ? Pourquoi voit-on dans les beaux jours d’oc- tobre l’air rempli de myriades de moucherons ? C’est parce que tous les oiseaux insectivores, tels que les hirondelles, les rossignols, fauvettes, gobe-mouches, etc., sont partis d’avance, comme s’ils prévoyaient que le premier froid doit détruire le fonds de leur subsistance, en frappant d’une mort universelle tous les êtres sur lesquels ils vivent ; et c’est vraiment une prévoyance, car ces oiseaux trouveraient encore, pendant les quinze ou vingt jours qui suivent celui de leur départ, la même quantité de subsistance, la même fourniture d’insectes qu’auparavant ; ce petit temps pendant lequel ils abandonnent trop tôt notre climat suffit pour que les insectes nous incom- modent par leur multitude plus qu’en aucune autre saison ; et cette incom- modité ne ferait qu’augmenter, car ils se multiplieraient à l’infini, si le froid n’arrivait pas tout à propos pour en arrêter la pullulation, et purger l’air de cette vermine, aussi superflue qu’incommode.

LES MOUCHEROLLES

Pour mettre de l’ordre et de la clarté dans l’énumération des espèces du genre très nombreux des gobe-mouches, nous avons cru devoir les diviser en trois ordres, relativement à leur grandeur, et nous sommes convenus d’appeler moucherolles ceux qui, étant plus grands que les gobe-mouches ordinaires, le sont moins que les tyrans, et forment entre ces deux familles une famille intermédiaire où s’observent les nuances et le passage de l’une et de l’autre.

On trouve des moucherolles, ainsi que des gobe-mouches, dans les deux continents ; mais dans chacun les espèces sont différentes, et aucune ne paraît commune aux deux. L’Océan est pour ces oiseaux, comme pour tous les autres animaux des pays méridionaux, une large barrière de séparation que les seuls oiseaux palmipèdes ont pu franchir, par la faculté qu’ils ont de se reposer sur l’eau.

Les climats chauds sont ceux du luxe de la nature ; elle y pare ses produc- tions, et quelquefois les charge de développements extraordinaires : plusieurs espèces d’oiseaux, tels que les veuves, les guêpiers et les moucherolles ont la queue singulièrement longue, ou prolongée de pennes exorbitantes ; ce