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364 ŒUVRES COMPLÈTES DE BUFFON.

perdrix de la Guiane ne nous étaient pas bien connues lorsque nous avons écrit l’histoire de ce genre d’oiseaux ; mais nous en donnerons la description à la suite de cet article.

En général, les tinamous sont tous bons à manger, leur chair est blanche, ferme, cassante et succulente, surtout celle des ailes, dont le goût a beau- coup de rapport à celui de la perdrix rouge ; les cuisses et le croupion ont d’ordinaire une amertume qui les rend désagréables ; cette amertume vient des fruits de balisier dont ces oiseaux se nourrissent, et l’on trouve la même amertume dans les pigeons ramiers qui mangent de ces fruits ; mais lorsque les tinamous se nourrissent d’autres fruits, comme de cerises sauvages, etc., alors toute leur chair est bonne, sans cependant avoir de fumet : au reste, on doit observer que, comme l’on ne peut garder aucun gibier plus de vingt- quatre heures à la Guiane sans qu’il soit corrompu par la grande chaleur et l’humidité du climat, il n’est pas possible que les viandes prennent le degré de maturité nécessaire à l’excellence du goût, et c’est par cette raison qu’aucun gibier de climat ne peut acquérir de fumet. Ces oiseaux, comme tous ceux qui ont un jabot, avalent souvent les fruits sans les broyer, ni même sans les casser ; ils aiment de préférence, non seulement les cerises sauvages, mais encore les fruits du palmier comon, et même ceux de l’arbre de café, lorsqu’ils se trouvent à portée d’en manger ; ce n’est pas sur les arbres mêmes qu’ils cueillent ces fruits, ils se contentent de les ramasser à terre ; ils les cherchent, ils grattent aussi la terre et la creusent pour y faire leur nid, qui n’est composé pour l’ordinaire que d’une couche d’herbes sèches ; ils font communément deux pontes par an, et toutes deux très nom- breuses, ce qui prouve encore que ces oiseaux, ainsi que l’agami, sont de la classe des gallinacés, lesquels pondent tous en beaucoup plus grand nombre que les autres oiseaux. Leur vol est aussi, comme celui des gallinacés, pe- sant et assez court, mais ils courent à terre avec une grande vitesse, ils vont en petites troupes, et il est assez rare de les trouver seuls ou par paires ; ils se rappellent en tout temps, matin et soir, et quelquefois aussi pendant le jour ; ce rappel est un sifflement lent, tremblant et plaintif, que les chas- seurs imitent pour les attirer à leur portée, car c’est l’un des meilleurs gibiers et le plus commun qui soit dans ce pays.

Au reste, nous observerons, comme une chose assez singulière, que, dans ce genre d’oiseaux ainsi que dans celui des fourmiliers, la femelle est néan- moins plus grosse que le mâle, ce qui n’appartient guère, dans nos climats, qu’à la classe des oiseaux de proie ; mais, du reste, les femelles tinamous sont presque entièrement semblables aux mâles par la forme du corps ainsi que par l’ordre et la distribution des couleurs.