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L’AGAMI. 357

lement qu’il y a beaucoup d’oiseaux qui, comme l’agami, ont la trachée- artère d’abord osseuse et ensuite cartilagineuse, et qu’en général ces oiseaux ont la voix grave ; mais il y a aussi beaucoup d’oiseaux qui ont, au contraire, la trachée-artère d’abord cartilagineuse et ensuite osseuse à l’entrée de la poitrine, et que ce sont ordinairement ceux-ci qui ont la voix aiguë et perçante.

Mais à l’égard de la formation du son singulier que rend cet oiseau, elle peut en effet provenir de la plus grande étendue de son poumon et des cloi- sons membraneuses qui le traversent ; cependant on doit observer que c’est par un faux préjugé qu’on est porté à croire que tous les sons qu’un animal fait entendre passent par la gorge ou par l’extrémité opposée, car quoique le son, en général, ait besoin de l’air pour véhicule, cependant on entend tous les jours dans le grouillement des intestins des sons qui ne passent ni par la bouche ni par l’anus, et qui sont cependant très sensibles à l’oreille ; il n’est donc pas nécessaire même de supposer que l’agami ouvre un peu le bec, comme le dit M. Wosmaër, pour que ce son se fasse entendre ; il suffit qu’il soit produit dans l’intérieur du corps de l’animal pour être entendu au dehors, parce que le son perce à travers les membranes et les chairs, et qu’étant une fois excité au dedans il est nécessaire qu’il se fasse entendre plus ou moins au dehors. D’ailleurs ce son sourd que l’agami fait entendre ne lui est pas particulier ; le hocco rend souvent un son de même nature, et qui même est plus articulé que celui de l’agami ; il prononce son nom et le fait entendre par syllabes, co, hocco, co, co, co, d’un ton grave profond et bien plus fort que celui de l’agami. Il n’ouvre pas le bec, en sorte qu’on peut les comparer parfaitement à cet égard. Et comme dans leur conformation intérieure il n’y a rien d’assez sensiblement différent de celle des autres oiseaux, nous croyons qu’on ne doit regarder ce son que comme une habi- tude naturelle commune à un grand nombre d’oiseaux, mais seulement plus sensible dans l’agami et le hocco. Le son grave que font entendre les coqs d’Inde avant leur cri, le roucoulement des pigeons qui s’exécute sans qu’ils ouvrent le bec, sont des sons de même nature, seulement ils se produisent dans une partie plus voisine de la gorge ; l’on voit celle du pigeon s’enfler et se distendre, au lieu que le son du hocco, et surtout celui de l’agami, sont produits dans une partie plus basse, si éloignée de la gorge qu’on est tenté de rapporter leur issue à l’ouverture opposée, par le préjugé dont je viens de parler, tandis que ce son intérieur, semblable aux autres sons qui se forment au dedans du corps des animaux, et surtout dans le grouillement des intestins, n’a point d’autre issue que la perméabilité des chairs et de la peau qui laisse passer le son au dehors du corps ; ces sons doivent moins

ont pris ce son pour un chant ou pour un ramage, puisqu’il se forme dans un organe tout différent, et précisément opposé à celui de la gorge. Voyage des Amazones, p. 175.