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comme autant de races distinctes, sortant originairement d’une même tige, et qui pourront s’y réunir un jour ; mais en me soumettant ainsi à la pluralité des voix, je protesterai hautement contre la fausse multiplication des espèces, source trop abondante de confusion et d’erreurs.

Les ortolans de roseaux[NdÉ 1] se plaisent dans les lieux humides, et nichent dans les joncs, comme leur nom l’annonce ; cependant ils gagnent quelquefois les hauteurs dans les temps de pluie ; au printemps on les voit le long des grands chemins, et sur la fin d’août ils se jettent dans les blés. M. Kramer assure que le millet est la graine qu’ils aiment le mieux. En général, ils cherchent leur nourriture le long des haies et dans les champs cultivés, comme les bruants ; ils s’éloignent peu de terre et ne se perchent guère que sur les buissons ; jamais ils ne se rassemblent en troupes nombreuses ; on n’en voit guère que trois ou quatre à la fois : ils arrivent en Lorraine vers le mois d’avril, et s’en retournent en automne, mais ils ne s’en retournent pas tous, et il y en a toujours quelques-uns qui restent dans cette province pendant l’hiver. On en trouve en Suède, en Allemagne, en Angleterre, en France et quelquefois, en Italie, etc.

Ce petit oiseau a presque toujours l’œil au guet, comme pour découvrir l’ennemi, et lorsqu’il a aperçu quelques chasseurs, il jette un cri qu’il répète sans cesse, et qui non seulement les ennuie, mais quelquefois avertit le gibier et lui donne le temps de faire sa retraite. J’ai vu des chasseurs fort impatientés de ce cri, qui a du rapport avec celui du moineau. L’ortolan de joncs a outre cela un chant fort agréable au mois de mai, c’est-à-dire au temps de la ponte.

Cet oiseau est un véritable hoche-queue, car il a dans la queue un mouvement de haut en bas assez brusque et plus vif que les lavandières.

Le mâle a le dessus de la tête noir ; la gorge et le devant du cou variés de noir et de gris roussâtre ; un collier blanc qui n’embrasse que la partie supérieure du cou : une espèce de sourcil et une bande au-dessous des yeux de la même couleur ; le dessus du corps varié de roux et de noir ; le croupion et les couvertures supérieures de la queue variés de gris et de roussâtre ; le dessous du corps d’un blanc teinté de roux ; les flancs un peu tachetés de noirâtre ; les pennes des ailes brunes, bordées de différentes nuances de roux ; les pennes de la queue de même, excepté les deux plus extérieures de chaque côté, lesquelles sont bordées de blanc ; le bec brun et les pieds d’une couleur de chair fort rembrunie.

La femelle n’a point de collier, sa gorge est moins noire, et sa tête est variée de noir et de roux clair ; le blanc qui se trouve dans son plumage n’est point pur, mais presque toujours altéré par une teinte de roux.

  1. Emberiza schœniclus L. [Note de Wikisource : actuellement Emberiza schoeniclus Linnæus, vulgairement bruant des roseaux].