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La longueur totale de cet oiseau est de six pouces et demi, celle du bec est de neuf lignes, et il est noir sur sa partie supérieure ; la tête, la gorge et l’estomac sont pourprés, et le reste du corps est noir avec quelques teintes de pourpre. L’iris des yeux est brun : la femelle diffère du mâle non seulement par la couleur du bec, mais encore par celles du plumage ; le dessus de son corps est brun avec quelques teintes d’un pourpre obscur, et le dessous rougeâtre ; la queue et les ailes sont brunes.

Un autre caractère distinctif du mâle, et qui n’avait pas encore été saisi, c’est une espèce de demi-collier autour de l’occiput, formé par de longs poils ou soies pourpres, qui débordent les plumes de près de trois lignes : c’est à M. Sonnini de Manoncour que nous devons cette nouvelle observation ; nous lui devons aussi la connaissance des habitudes naturelles de cet oiseau et des autres tangaras de la Guyane.

Le bec-d’argent est de tous les tangaras celui qui est le plus répandu dans l’île de Cayenne et à la Guyane : il y a apparence qu’il se trouve dans plusieurs climats chauds de l’Amérique, car Fernandez en parle comme d’un oiseau du Mexique, vers les montagnes de Tepuz-Cullula[1]. Il se nourrit de petits fruits ; il entame aussi les bananes, les goyaves et autres gros fruits tendres lorsqu’ils sont en maturité, et ne mange point d’insectes. Ces oiseaux fréquentent les lieux découverts, et ne fuient pas le voisinage des habitations ; on en voit jusque dans les jardins : cela n’empêche pas qu’ils ne soient assez communs dans les endroits déserts et même dans les clairières des forêts, car dans les plus épaisses, lorsque les vents ont abattu un certain nombre d’arbres, et que le soleil peut éclairer cet abattis et assainir le terrain, on ne manque pas d’y trouver quelques becs-d’argent, qui ne vont cependant pas en troupes, mais toujours par paires.

Leur nid est un cylindre un peu courbé qu’ils attachent entre les branches horizontalement, l’ouverture en bas, de manière que, de quelque côté que vienne la pluie, elle ne peut y entrer ; ce nid est long de plus de six pouces, et a quatre pouces et demi de largeur ; il est construit de paille et de feuilles de balisier desséchées, et le fond du nid est bien garni intérieurement de morceaux plus larges des mêmes feuilles. C’est sur les arbres peu élevés que l’oiseau attache ce nid ; la femelle y pond deux œufs elliptiques, blancs et chargés au gros bout de petites taches d’un rouge léger, qui se perdent en approchant de l’autre extrémité.

Quelques nomenclateurs ont donné à cet oiseau le nom de cardinal[2], mais c’est improprement, parce qu’il a été appliqué, par ces mêmes nomenclateurs, à plusieurs autres espèces D’autres ont cru qu’il y avait une variété assez apparente dans cette espèce : on voit, dans le Cabinet de M. Mauduit,

  1. Fernand., Hist. nov. Hisp., p. 51, cap. 189.
  2. MM. Brisson et Salerne.