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un oiseau qui vole pesamment et en battant des ailes : les plumes qu’il a sur la tête sont plus longues que les autres, et lui font une espèce de huppe assez peu marquée.

M. Sonnerat a rapporté des Philippines une véritable rousserolle, parfaitement semblable à celle du no 513.


LA DRAINE[1]

Cette grive[NdÉ 1] se distingue de toutes les autres par sa grandeur, et cependant il s’en faut bien qu’elle soit aussi grosse que la pie, comme on le fait dire à Aristote[2], peut-être par une erreur de copiste, car la pie a presque le double de masse, à moins que les grives ne soient plus grosses en Grèce qu’ici, où la draine, qui est certainement la plus grosse de toutes, ne pèse guère que cinq onces.

Les Grecs et les Romains regardaient les grives comme oiseaux de passage[3], et ils n’avaient point excepté la draine qu’ils connaissaient parfaitement sous le nom de grive viscivore, ou mangeuse de gui.

En Bourgogne, les draines arrivent en troupes au mois d’octobre et de novembre, venant, selon toute apparence, des montagnes de Lorraine[4] ;

  1. On l’appelle, en différentes provinces de France, ciserre, jocasse ou jacode, grive de brou, grive provençale, gillonière (du mot gillon, qui signifie gui en savoyard), trie, trage, truie, treiche, treine, tric-trac, etc. : le tout selon M. Salerne, qui applique mal à propos à la draine (p. 168) les noms de cha-cha, chia-chia, gia-gia, lesquels expriment évidemment le cri de la litorne. Belon prétend que c’est par erreur qu’on l’appelle à Paris une calandre (Nature des oiseaux, p. 324) ; nous avons vu, en effet, que c’était le nom de la grosse alouette, et il ne faut pas donner le même nom à des espèces différentes. La draine s’appelle aussi haute grive en Lorraine, et verquete en Bugey, où le gui se nomme verquet.
  2. Historia animalium, lib. ix, cap. xx.
  3. Voyez Aristot., Historia animalium, lib. viii, cap. xvi. — Pline, lib. x, cap. xxiv. — Varro, De Re rusticâ, lib. iii, cap. v.
  4. M. le docteur Lottinger, de Sarbourg, m’assure que celles de ces grives qui s’éloignent des montagnes de Lorraine aux approches de l’hiver partent en septembre et en octobre, qu’elles reviennent aux mois de mars et d’avril, qu’elles nichent dans les forêts dont ces montagnes sont couvertes, etc. Tout cela s’accorde fort bien avec ce que nous avons dit d’après nos connaissances particulières ; mais je ne dois pas dissimuler la contrariété qui se
  1. La Draine ou Grive viscivore (Turdus viscivorus L. [Note de Wikisource : actuellement Turdus viscivorus Linnæus, vulgairement grive draine]) est la plus grande des Grives de notre pays. « Elle a 28 centimètres de long et 45 à 48 centimètres d’envergure ; l’aile pliée mesure 15 à 16 centimètres, et la queue 11 à 12. Le dos est gris foncé ; la face intérieure du corps est blanchâtre, semée de taches d’un brun noir, triangulaires à la gorge, réniformes ou ovales à la poitrine ; les plumes des ailes et de la queue sont noirâtres, à bords d’un gris jaunâtre clair. L’œil est brun, le bec jaunâtre à la base et brun dans le reste de son étendue ; les pattes sont couleur de chair. La femelle est un peu plus petite que le mâle. Chez les jeunes, les plumes du ventre sont marquées de taches longitudinales jaunâtres, et noirâtres à l’extrémité ; les plumes des couvertures supérieures de l’aile sont jaunes le long de la tige. » (Brehm.)