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ils n’avaient pas non plus le même plumage ; et, si ces différences étaient permanentes, on serait fondé à les regarder comme les caractères d’une autre race, ou, si l’on veut, d’une variété constante dans l’espèce dont il s’agit ici.


LA ROUSSEROLLE[1]

On a donné à cet oiseau[NdÉ 1] le nom de rossignol de rivière, parce que le mâle chante la nuit comme le jour, tandis que la femelle couve, et parce qu’il se plaît dans les endroits humides ; mais il s’en faut bien que son chant soit aussi agréable que celui du rossignol, quoiqu’il ait plus d’étendue : il l’accompagne ordinairement d’une action très vive et d’un trémoussement de tout son corps ; il grimpe le long des roseaux et des saules peu élevés, comme font les grimpereaux, et il vit des insectes qu’il y trouve.

L’habitude qu’a la rousserolle de fréquenter les marécages semble l’éloigner de la classe des grives, mais elle s’en rapproche tellement par sa forme extérieure que M. Klein, qui l’a vue presque vivante, puisqu’on en tua une en sa présence, doute qu’on puisse la rapporter à un autre genre. Il nous apprend que ces oiseaux se tiennent dans les îles de l’embouchure de la Vistule, qu’ils font leur nid à terre, sur le penchant des petits tertres couverts de mousse[2]. Enfin, il soupçonne qu’ils passent l’hiver dans les bois épais et marécageux[3] : il ajoute qu’ils ont toute la partie supérieure du corps d’un brun roux, la partie inférieure d’un blanc sale, avec quelques taches cendrées ; le bec noir, le dedans de la bouche orangé comme les grives, et les pieds plombés[4].

Un habile observateur m’a assuré qu’il connaissait en Brie une petite rousserolle nommée vulgairement effarvatte, laquelle babille aussi continuellement, et se tient dans les roseaux comme la grande. Cela explique la contrariété des opinions sur la taille de la rousserolle que M. Klein a vue grosse comme une grive, et M. Brisson seulement comme une alouette. C’est

  1. C’est la sixième grive de M. Brisson, t. II, p. 219. Belon a cru mal à propos que c’était l’alcyon vocal d’Aristote ; car cet alcyon a le dos bleu ; on lui a donné le nom de rousserolle, à cause de la couleur rousse de son plumage, d’autres celui de roucherolle, parce qu’elle se tient parmi les rouches, c’est-à-dire parmi les joncs ; d’autres celui de tire-arrache, à cause de son cri : selon Belon elle prononce distinctement ces syllabes : toro, tret, fuys, huy, tret.
  2. « Ils le font entre les cannes et rouches, avec de petites pailles de rouseaux », suivant Belon, et ils pondent cinq à six œufs, p. 224.
  3. Belon, qui avait d’abord regardé la rousserolle comme oiseau de passage, assure que depuis il avait connu le contraire.
  4. Voyez Ordo Avium, p. 179.
  1. La Rousserolle de Buffon n’est pas une Grive, mais une Fauvette. [Note de Wikisource : Le rossignol des rivières, ou plus justement la rousserolle turdoïde, est actuellement nommée Acrocephalus arundinaceus Linnæus. La rousserolle effarvate est actuellement nommée Acrocephalus scirpaceus Hermann.]