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rations qui ont rapport à la multiplication de l’espèce, il n’y aurait qu’à les faire nicher dans une chambre ; cela est possible, quoiqu’on l’ait tenté plusieurs fois sans succès ; mais il est plus ordinaire et plus aisé de croiser cette race avec celle des serins : il y a une sympathie marquée entre ces deux races, au point que si on lâche un tarin dans un endroit où il y ait des canaris en volière, il ira droit à eux, s’en approchera autant qu’il sera possible, et que ceux-ci les rechercheront aussi avec empressement ; et si on lâche dans la même chambre un mâle et une femelle tarin avec bon nombre de canaris, ces derniers, comme on l’a déjà remarqué, s’apparieront indifféremment entre eux et avec les tarins[1], surtout avec la femelle, car le mâle reste quelquefois vacant.

Lorsqu’un tarin s’est apparié avec une femelle canari, il partage tous ses travaux avec beaucoup de zèle, il l’aide assidûment à porter les matériaux du nid et à les employer, et ne cesse de lui dégorger la nourriture tandis qu’elle couve ; mais malgré toute cette bonne intelligence, il faut avouer que la plupart des œufs restent clairs. Ce n’est point assez de l’union des cœurs pour opérer la fécondation, il faut de plus un certain accord dans les tempéraments, et à cet égard le tarin est fort au-dessous de la femelle canari. Le peu de métis qui proviennent de leur union, tiennent du père et de la mère.

En Allemagne, le passage des tarins commence en octobre ou même plus tôt ; ils mangent alors les graines du houblon, au grand préjudice des propriétaires ; on reconnaît les endroits où ils se sont arrêtés, à la quantité de feuilles dont la terre est jonchée ; ils disparaissent tout à fait au mois de décembre et reviennent au mois de février[2] ; chez nous ils arrivent au temps de la vendange, et repassent lorsque les arbres sont en fleurs ; ils aiment surtout la fleur du pommier.

En Provence, ils quittent les bois et descendent des montagnes sur la fin de l’automne ; on en trouve alors des volées de deux cents et plus, qui se posent tous sur le même arbre, ou ne s’éloignent que très peu. Le passage dure quinze ou vingt jours, après quoi on n’en voit presque plus[3].

Le tarin de Provence diffère du nôtre en ce qu’il est un peu plus grand et d’un plus beau jaune[4] ; c’est une petite variété du climat.

Ces oiseaux ne sont point rares en Angleterre, comme le croyait Turner[5] ;

  1. Le R. P. Bougot, de qui je tiens ces faits, a vu cinq années de suite une femelle tarin faire régulièrement trois pontes par an avec le même mâle canari, et les quatre années suivantes faire deux pontes par an avec un autre mâle, le premier étant mort.
  2. Frisch, à l’endroit cité.
  3. Note de M. le marquis de Piolenc.
  4. Note de M. Guys.
  5. Je dis cela sur la foi de Willughby, p. 192. Cependant les auteurs de la Zoologie Britannique avouent qu’ils n’ont jamais vu cet oiseau dans leur pays, d’où l’on peut conclure légitimement que du moins il n’est pas commun.