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La même altération de couleur a eu lieu dans les mêmes circonstances sur un chardonneret que l’on nourrissait en cage dans la ville que j’habite ; il était noir sans exception.

Celui de M. Brisson avait quatre pennes de l’aile, depuis la quatrième à la septième inclusivement, bordées d’une belle couleur soufre au dehors et de blanc à l’intérieur, ainsi que les moyennes, une de ces dernières terminée de blanc ; enfin le bec, les pieds et les ongles blanchâtres ; mais la description la plus exacte ne représente qu’un moment de l’individu, et son histoire la plus complète qu’un moment de l’espèce : c’est à l’histoire générale à représenter, autant qu’il est possible, la suite et l’enchaînement des différents états par où passent et les individus et les espèces.

Il y a actuellement à Beaune deux chardonnerets noirs, sur lesquels je me suis procuré quelques éclaircissements ; ce sont deux mâles ; l’un a quatre ans, l’autre est plus âgé : ils ont l’un et l’autre essuyé trois mues, et ont recouvré trois fois leurs couleurs qui étaient très belles ; c’est à la quatrième mue qu’ils sont devenus d’un beau noir lustré sans mélange : ils conservent cette nouvelle couleur depuis huit mois, mais il paraît qu’elle n’est pas plus fixe que la première, car on commence à apercevoir (25 mars) du gris sur le ventre d’un de ces oiseaux, du rouge sur sa tête, du roux sur son dos, du jaune sur les pennes de ses ailes[1], du blanc à leurs extrémités et sur le bec. Il serait curieux de rechercher l’influence que peuvent avoir dans ces changements de couleurs la nourriture, l’air, la température, etc. On sait que le chardonneret, électrisé par M. Klein, avait entièrement perdu, six mois après, non seulement le rouge de sa tête, mais la belle plaque citrine de ses ailes[2].

VIII.Le chardonneret noir à tête orangée[3].

Aldrovande trouvait cet oiseau si différent du chardonneret ordinaire, qu’il le regardait, non comme étant de la même espèce, mais seulement du même genre ; il était plus gros que le chardonneret et aussi gros que le pinson ; ses yeux étaient plus grands à proportion ; il avait le dessus du corps noirâtre, la tête de même couleur, excepté que sa partie antérieure, près du bec, était entourée d’une zone d’un orangé vif ; la poitrine et les couvertures supérieures des ailes d’un noir verdâtre ; le bord extérieur des pennes des ailes de même, avec une bande d’un jaune faible, et non d’un beau citron comme dans le chardonneret ; le reste des pennes noir, varié de

  1. Les 1re, 2e, 5e, 6e, 7e et 11e de l’une des ailes et quelques-unes de l’autre.
  2. T. Klein, Ordo avium, p. 93.
  3. « Carduelis congener, rostro fasciolâ croceâ circumdato. » Aldrovande, Ornithol., t. II, p. 801-803. — Willughby, Ornithol., p. 189. — Carduelis nigra icterocephalos, G, le chardonneret noir à tête jaune. Brisson, t. III, p. 61.