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La femelle a moins de rouge que le mâle, et n’a point du tout de noir. Les jeunes ne prennent leur beau rouge que la seconde année : dans les premiers temps leurs couleurs sont ternes, indécises, et c’est pour cela qu’on les appelle grisets ; cependant le jaune des ailes paraît de très bonne heure, ainsi que les taches blanches des pennes de la queue ; mais ces taches sont d’un blanc moins pur[1].

Les mâles ont un ramage très agréable et très connu ; ils commencent à le faire entendre vers les premiers jours du mois de mars, et ils continuent pendant la belle saison, ils le conservent même l’hiver dans les poêles, où ils trouvent la température du printemps[2]. Aldrovande leur donne le second rang parmi les oiseaux chanteurs, et M. Daines Barrington ne leur accorde que le sixième. Ils paraissent avoir plus de disposition à prendre le chant du roitelet que celui de tout autre oiseau ; on en voit deux exemples : celui d’un joli métis sorti d’un chardonneret et d’une serine, observé à Paris par M. Salerne[3], et celui d’un chardonneret qui avait été pris dans le nid deux ou trois jours après qu’il était éclos, et qui a été entendu par M. Daines Barrington. Ce dernier observateur suppose, à la vérité, que cet oiseau avait eu occasion d’entendre chanter un roitelet, et que ces sons avaient été, sans doute, les premiers qui eussent frappé son oreille dans le temps où il commençait à être sensible au chant et capable d’imitation[4] ; mais il faudrait donc faire la même supposition pour l’oiseau de M. Salerne, ou convenir qu’il y a une singulière analogie, quant aux organes de la voix, entre le roitelet et le chardonneret.

    sont appelés quatrains ; enfin quelques-uns n’en ont que deux, et on n’a pas manqué d’attribuer au nombre de ces petites taches, la différence qu’on a remarquée dans le chant de chaque individu : on prétend que ce sont les sizains qui chantent le mieux, mais c’est sans aucun fondement, puisque souvent l’oiseau qui était sizain pendant l’été, devient quatrain après la mue, quoiqu’il chante toujours de même. Kramer dit, dans son Elenchus veget. et animal. Austriæ inferioris, page 366, que les pennes de la queue et des ailes ne sont terminées de blanc que pendant l’automne, et qu’elles sont entièrement noires au printemps. Cela est dit trop généralement. J’ai sous les yeux, aujourd’hui 6 avril, deux mâles chardonnerets qui ont toutes les pennes des ailes (excepté les deux premières) et les six intermédiaires de la queue terminées de blanc, et qui ont aussi les taches blanches ovales sur le côté intérieur des deux pennes latérales de la queue.

  1. Observé avant le 15 de juin. J’ai aussi remarqué que les chardonnerets, tout petits, avaient le bec brun, excepté la pointe et les bords qui étaient blanchâtres et transparents, ce qui est le contraire de ce que l’on voit dans les adultes.
  2. Frisch, Oiseaux, t. Ier, pl. 1, no 2. — J’en ai eu deux qui n’ont pas cessé de gazouiller un seul jour cet hiver, dans une chambre bien fermée, mais sans feu ; il est vrai que le plus grand froid n’a été que de 8 degrés.
  3. Histoire naturelle des oiseaux, p. 276.
  4. Voyez Lettre sur le chant des oiseaux, du 10 janvier 1773. Transactions philosophiques, vol. LXIII, part. II. Olina dit que les jeunes chardonnerets qui sont à portée d’entendre des linottes, des serins, etc., s’approprient leur chant : cependant je sais qu’un jeune chardonneret et une jeune linotte ayant été élevés ensemble, le chardonneret a conservé son ramage pur, et que la linotte l’a adopté au point qu’elle n’en a plus d’autre ; il est vrai qu’en l’adoptant elle l’a embelli.