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LE CHARDONNERET[1]


Beauté du plumage, douceur de la voix, finesse de l’instinct, adresse singulière, docilité à l’épreuve, ce charmant petit oiseau[NdÉ 1] réunit tout, et il ne lui manque que d’être rare et de venir d’un pays éloigné pour être estimé ce qu’il vaut.

Le rouge cramoisi, le noir velouté, le blanc, le jaune doré, sont les principales couleurs qu’on voit briller sur son plumage, et le mélange bien entendu de teintes plus douces ou plus sombres leur donne encore plus d’éclat : tous les yeux en ont été frappés également, et plusieurs des noms qu’il porte en différentes langues sont relatifs à ces belles couleurs. Les noms de chrysomitrès, d’aurivittis, de gold-finch, n’ont-ils pas en effet un rapport évident à la plaque jaune dont ses ailes sont décorées ; celui de roth-vogel au rouge de sa tête et de sa gorge ; ceux d’asteres, d’astrolinus, à l’éclat de ses diverses couleurs ; et ceux de pikilis, de varia, à l’effet qui résulte de leur variété ? Lorsque ses ailes sont dans leur état de repos, chacune présente une suite de points blancs d’autant plus apparents qu’ils se trouvent sur un fond noir. Ce sont autant de petites taches blanches qui terminent toutes les pennes de l’aile, excepté les deux ou trois premières. Les pennes de la queue sont d’un noir encore plus foncé, les six intermédiaires sont terminées de blanc, et les deux dernières ont de chaque côté, sur leurs barbes intérieures, une tache blanche ovale très remarquable. Au reste, tous ces points blancs ne sont pas toujours en même nombre, ni distribués de la même manière[2], et il faut avouer qu’en général le plumage des chardonnerets est fort variable.

  1. Chardonneret, pinson doré, pinson de chardon, χρυσομίτρης, portemitre d’or, ἀκανθὶς, trèflier, parce qu’il mange la graine du grand trèfle ; en Provence, cardaline ; en Périgord, cardalino ; en Guyenne, cardinat, chardonneret, chardonneau, chardrier ; en Picardie, cadoreu ; le jeune qui n’a pas encore pris ses belles couleurs, griset. Salerne, Hist. nat. des oiseaux, p. 274. — « Carduelis fusco rufescens ; capite anteriùs et gutture rubiis ; remigibus nigris apice albis, primâ medietate exteriùs luteis ; rectricibus nigris, sex intermedis apice albis, duabus utrimque extimis interiùs albo maculatis… » Carduelis, le chardonneret. Brisson, t. III, p. 53. — « The gold-finch, carduelis Gessneri. » British Zoology, g. 22, sp. 1, p. 108.
  2. Les chardonnerets qui ont les six pennes intermédiaires de la queue terminées de blanc s’appellent sizains ; ceux qui en ont huit sont appelés huitains ; ceux qui en ont quatre,
  1. Carduelis elegans (Fringilla Carduelis L.). [Note de Wikisource : On le nomme actuellement Carduelis carduelis Linnæus, vulgairement chardonneret élégant ; c’est un Fringillidé.]