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LA LINOTTE


C’est la nature elle-même qui semble avoir marqué la place de ces oiseaux[NdÉ 1] immédiatement après les serins puisque c’est en vertu des rapports établis par elle entre ces deux espèces que leur mélange réussit mieux que celui de l’une des deux avec toute autre espèce voisine ; et, ce qui annonce encore une plus grande analogie, les individus qui résultent de ce mélange sont féconds[1], surtout lorsqu’on a eu soin de former la première union entre le linot mâle et la femelle canari.

Il est peu d’oiseaux aussi communs que la linotte, mais il en est peut-être encore moins qui réunissent autant de qualités : ramage agréable, couleurs distinguées, naturel docile et susceptible d’attachement, tout lui a été donné, tout ce qui peut attirer l’attention de l’homme et contribuer à ses plaisirs : il était difficile avec cela que cet oiseau conservât sa liberté, mais il était encore plus difficile qu’au sein de la servitude où nous l’avons réduit il conservât ses avantages naturels dans toute leur pureté. En effet, la belle

  1. Cette observation m’a été donnée par M. Daubenton le jeune ; M. Frisch assure qu’en appariant un linot de vignes avec une femelle canari blanche, accoutumée à sortir tous les jours, et à revenir au gîte, celle-ci fera son nid et sa ponte dans un buisson voisin, et que, lorsque ses petits seront éclos, elle les rapportera à la fenêtre de la maison. Il ajoute que ces mulets auront le plumage blanc de la mère, et les marques rouges du père, principalement sur la tête.
  1. Les Linottes (Cannabina) sont des Passereaux caractérisés par un bec conique, arrondi, court, très pointu ; par des ailes étroites et pointues, assez longues ; par une queue échancrée. [Note de Wikisource : On appelle aujourd’hui linottes quatre espèces d’oiseaux, réunies dans le genre Linaria, famille des Fringillidés.]

    La Linotte vulgaire, Cannabina Linotta (Fringilla Cannabina L.) [Note de Wikisource : actuellement Linaria cannabina Linnæus, vulgairement linotte mélodieuse], offre des couleurs très diverses suivant les sexes, l’âge et les saisons. Au printemps, le mâle « a la partie antérieure d’un rouge vif ; la partie postérieure du crâne, la nuque, les côtés de la tête et du cou gris ; le dos d’un brun de rouille ; le croupion blanchâtre, la gorge d’un blanc grisâtre, la poitrine d’un rouge vif, le ventre blanc, les flancs d’un brun clair. En automne, le rouge disparaît, masqué qu’il est par la couleur plus claire des bordures des plumes ; à mesure que le printemps approche, le rouge, au contraire, devient plus vif par suite de l’usure des plumes. La femelle a la tête et le cou bruns ou d’un gris cendré, jaunâtre, la tige des plumes étant plus foncée que les barbes ; le dos d’un brun rouge. La gorge, la partie supérieure de la poitrine et les flancs sont d’un brun jaunâtre clair, avec des taches d’un brun noirâtre disposées longitudinalement. Les jeunes ont à peu près le même plumage que les femelles ; ils sont seulement plus tachetés. Si on les met tout jeunes en cage, ils ne deviennent jamais rouges, et chez les vieux mêmes cette couleur, en captivité, tourne au jaune ou au rouge jaune ; quelquefois elle se perd entièrement. » (Brehm.)