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organiques, qui étaient précédemment employées à faire le fond de la liqueur séminale, se trouvent absorbées par cette autre production : c’est par cette raison que, dans ce même temps de mue, les oiseaux ne se cherchent ni ne s’accouplent et qu’ils cessent de produire, car ils manquent alors de ce surplus de vie dont tout être a besoin pour pouvoir la communiquer à d’autres.

La maladie la plus funeste et la plus ordinaire, surtout aux jeunes serins, est celle que l’on appelle l’avalure : il semble en effet que leurs boyaux soient alors avalés et descendus jusqu’à l’extrémité de leur corps. On voit les intestins à travers la peau du ventre dans un état d’inflammation, de rougeur et de distension ; les plumes de cette partie cessent de croître et tombent, l’oiseau maigrit, ne mange plus, et cependant se tient toujours dans la mangeoire, enfin, il meurt en peu de jours ; la cause du mal est la trop grande quantité ou la qualité trop succulente de la nourriture qu’on leur a donnée. Tous les remèdes sont inutiles ; il n’y a que par la diète qu’on peut sauver quelques-uns de ces malades dans un très grand nombre. On met l’oiseau dans une cage séparée, on ne lui donne que de l’eau et de la graine de laitue ; ces aliments rafraîchissants et purgatifs tempèrent l’ardeur qui le consume, et opèrent quelquefois des évacuations qui lui sauvent la vie. Au reste, cette maladie ne vient pas de la nature, mais de l’art que nous mettons à élever ces oiseaux, car il est très rare que ceux qu’on laisse nourrir par leurs pères et leurs mères en soient atteints. On doit donc avoir la plus grande attention à ne leur donner que très peu de chose en les élevant à la brochette : de la navette bouillie, un peu de mouron et point du tout de sucre ni de biscuit, et en tout plutôt moins que trop de nourriture.

Lorsque le serin fait un petit cri fréquent, qui paraît sortir du fond de la poitrine, on dit qu’il est asthmatique : il est encore sujet à une certaine extinction de voix, surtout après la mue ; on guérit cette espèce d’asthme en lui donnant de la graine de plantain et du biscuit dur trempé dans du vin blanc, et on fait cesser l’extinction de voix en lui fournissant de bonnes nourritures, comme du jaune d’œufs haché avec de la mie de pain, et pour boisson de la tisane de réglisse, c’est-à-dire de l’eau où l’on fera tremper et bouillir de cette racine.

Les serins ont quelquefois une espèce de chancre qui leur vient dans le bec ; cette maladie provient des mêmes causes que celle de l’avalure ; les nourritures trop abondantes ou trop substantielles que nous leur fournissons produisent quelquefois une inflammation qui se porte à la gorge et au palais, au lieu de tomber sur les intestins ; aussi guérit-on cette espèce de chancre comme l’avalure par la diète et par des rafraîchissants. On leur donne de la graine de laitue, et on met dans leur eau quelques semences de melon concassées[1].

  1. Traité des serins de Canarie, p. 245 et suivantes.