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pourvu que leur ponte soit commencée avant ce temps. Les oiseaux de la même nichée ne muent pas tous en même temps. Les plus faibles sont les premiers qui subissent ce changement d’état ; les plus forts ne muent souvent que plus d’un mois après. La mue des serins jonquilles est plus longue et ordinairement plus funeste que celle des autres. Ces femelles jonquilles ne font que trois pontes de trois œufs chacune ; les blonds, mâles et femelles, sont trop délicats, et leur nichée réussit rarement ; les isabelles ont quelque répugnance à s’apparier ensemble, le mâle prend rarement, dans une grande volière, une femelle isabelle, et ce n’est qu’en les mettant tous deux en cage qu’ils se déterminent à s’unir. Les blancs, en général, sont bons à tout, ils couvent, nichent et produisent aussi bien et mieux qu’aucun des autres, et les blancs panachés sont aussi les plus forts de tous.

Malgré ces différences dans le naturel, le tempérament, et dans le nombre de la production de ces oiseaux, le temps de l’incubation est le même : tous couvent également treize jours, et lorsqu’il y a un jour de plus ou de moins, cela paraît venir de quelque circonstance particulière : le froid retarde l’éclosion des petits et le chaud l’accélère ; aussi arrive-t-il souvent que la première couvée, qui se trouve au mois d’avril, dure treize jours et demi ou quatorze jours au lieu de treize, si l’air est alors plus froid que tempéré ; et au contraire, dans la troisième couvée, qui se fait pendant les grandes chaleurs du mois de juillet ou d’août, il arrive quelquefois que les petits sortent de l’œuf au bout de douze jours et demi ou même douze jours. On fera bien de séparer les mauvais œufs des bons, mais pour les reconnaître d’une manière sûre, il faut attendre qu’ils aient été couvés pendant huit ou neuf jours ; on prend doucement chaque œuf par les deux bouts, crainte de les casser, on les mire au grand jour ou à la lumière d’une chandelle, et l’on rejette tous ceux qui sont clairs ; ils ne feraient que fatiguer la femelle si on les laissait ; en triant ainsi les œufs clairs, on peut assez souvent de trois couvées n’en faire que deux ; la troisième femelle se trouvera libre et travaillera bientôt à une seconde nichée[1]. Une pratique fort recommandée par les oiseleurs, c’est d’enlever les œufs à la femelle à mesure qu’elle les pond

    œuvées que toutes celles dont je viens de parler, elles font cinq pontes et en feraient davantage si ou les laissait faire ; chacune de leurs pontes est souvent de six à sept œufs. Lorsque cette espèce de serins nourrissent bien, ils sont parfaits, l’on ne les saurait trop ménager ; leur valeur doit surpasser le prix de six autres communs. Traité des serins des Canaries, p. 171 et suiv.

  1. Lorsqu’on distribue les œufs d’une femelle à d’autres, il faut qu’ils soient tous bons ; les femelles panachées auxquelles on donnerait des œufs clairs ou mauvais ne manqueraient pas de les jeter elles-mêmes hors du nid au lieu de les couver ; et lorsque le nid est trop profond pour qu’elles puissent les faire couler à terre, elles ne cessent de les becqueter jusqu’à ce qu’ils soient cassés, ce qui gâte les autres œufs et souvent infecte le nid et fait avorter la couvée entière ; les femelles d’autres couleurs couvent les œufs clairs qu’on leur donne. (Note du R. P. Bougot.)