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LE SIFILET OU MANUCODE À SIX FILETS

Si l’on prend les filets pour le caractère spécifique des manucodes, celui-ci est le manucode par excellence[NdÉ 1] ; car au lieu de deux filets il en a six, et de ces six il n’en sort pas un seul du dos, mais tous prennent naissance de la tête, trois de chaque côté ; ils sont longs d’un demi-pied et se dirigent en arrière ; ils n’ont de barbes qu’à leur extrémité, sur une étendue d’environ six lignes : ces barbes sont noires et assez longues.

Indépendamment de ces filets, l’oiseau dont il s’agit dans cet article a encore deux autres attributs qui, comme nous l’avons dit, semblent propres aux oiseaux de Paradis, le luxe des plumes et la richesse des couleurs.

Le luxe des plumes consiste, dans le sifilet : 1o en une sorte de huppe, composée de plumes raides et étroites, laquelle s’élève sur la base du bec supérieur ; 2o dans la longueur des plumes du ventre et du bas-ventre, lesquelles ont jusqu’à quatre pouces et plus : une partie de ces plumes, s’étendant directement, cache le dessous de la queue, tandis qu’une autre partie, se relevant obliquement de chaque côté, recouvre la face supérieure de cette même queue jusqu’au tiers de sa longueur, et toutes répondent aux plumes subalaires de l’oiseau de Paradis et du manucode.

À l’égard du plumage, les couleurs les plus éclatantes brillent sur son cou : par derrière, le vert doré et le violet bronzé ; par devant, l’or de la topaze, avec des reflets qui se jouent dans toutes les nuances du vert, et ces couleurs tirent un nouvel éclat de leur opposition avec les teintes rembrunies des parties voisines ; car la tête est d’un noir changeant en violet foncé, et tout le reste du corps est d’un brun presque noirâtre, avec des reflets du même violet foncé.

Le bec de cet oiseau est le même, à peu près, que celui des oiseaux de Paradis ; la seule différence, c’est que son arête supérieure est anguleuse et tranchante, au lieu qu’elle est arrondie dans la plupart des autres espèces.

On ne peut rien dire des pieds ni des ailes, parce qu’on les avait arrachés à l’individu qui a servi de sujet à cette description, suivant la coutume des chasseurs ou marchands indiens ; tout ce monde ayant intérêt, comme nous avons dit, de supprimer ce qui augmente inutilement le poids ou le volume, et bien plus encore ce qui peut offusquer les belles couleurs de ces oiseaux.


  1. Les ornithologistes modernes placent cet oiseau dans un genre Parotia, ayant, comme les Paradisæa, les plumes des flancs allongées, mais se distinguant des Paradisæa en ce que ces plumes ne sont pas filiformes et recouvrent les ailes en se repliant ; la queue est arrondie et étagée ; les deux premières rémiges sont terminées en lame de canif ; la tête est pourvue de six brins grêles, filiformes, insérés en arrière des oreilles et terminés en palette. Le Sifilet (Paradisæa aurea L.) prend, dans cette nouvelle nomenclature, le nom de Parotia aurea [Note de Wikisource : actuellement Parotia sefilata Pennant, vulgairement paradisier sifilet].