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m’assure qu’il ne se trouve que dans les lieux inhabités ; c’est probablement l’une des causes de sa rareté en Europe.

M. Brisson dit que la femelle ne diffère du mâle que par les couleurs, ayant du brun partout où celui-ci a du noir, et qu’il lui est semblable dans tout le reste[1]. Mais Aldrovande, en reconnaissant que le fond de son plumage est brun, remarque qu’elle a du cendré aux ailes et au cou, le bec moins crochu et point de queue[2], ce qui serait un trait de conformité avec le hocco des Amazones de Barrère, dont la femelle, comme nous l’avons vu, a la queue beaucoup moins longue que le mâle[3] ; et ce ne sont pas les seuls oiseaux d’Amérique qui n’aient point de queue : il y a même tel canton de ce continent où les poules, transportées d’Europe, ne peuvent vivre longtemps sans perdre leur queue et même leur croupion, comme nous l’avons vu dans l’histoire du coq.

III.L’HOAZIN.

Cet oiseau[NdÉ 1] est représenté, dans nos planches enluminées, sous le nom de faisan huppé de Cayenne, du moins il n’en diffère que très peu, comme on peut en juger en comparant notre planche cccxxxvii à la description de Hernandez.

Selon cet auteur, l’hoazin n’est pas tout à fait aussi gros qu’une poule d’Inde ; il a le bec courbé, la poitrine d’un blanc jaunâtre, les ailes et la queue marquées de taches ou raies blanches à un pouce de distance les unes des autres, le dos, le dessus du cou, les côtés de la tête, d’un fauve brun ; les pieds de couleur obscure : il porte une huppe composée de plumes blanchâtres d’un côté et noires de l’autre ; cette huppe est plus haute et d’une autre forme que celle des hoccos, et il ne paraît pas qu’il puisse la baisser et la relever à son gré ; il a aussi la tête plus petite et le cou plus grêle.

Sa voix est très forte, et c’est moins un cri qu’un hurlement : on dit qu’il prononce son nom, apparemment d’un ton lugubre et effrayant ; il n’en fallait pas davantage pour le faire passer chez des peuple grossiers pour un oiseau de mauvais augure ; et comme partout on suppose beaucoup de puissance à ce que l’on craint, ces mêmes peuples ont cru trouver en lui des remèdes aux maladies les plus graves ; mais on ne dit pas qu’ils s’en nourrissent ; ils s’en abstiennent en effet, peut-être par une suite de cette même crainte, ou par répugnance, fondée sur ce qu’il fait sa pâture ordinaire de serpents : il

  1. Brisson, Ornithologie, t. Ier, p. 303.
  2. Voyez Aldrovande, Ornithologia, t. II, p. 334.
  3. Barrère, Novum Ornithologiæ specimen, p. 82.
  1. Phasianus cristatus L. [actuellement Opisthocomus hoazin Statius Müller, vulgairement hoazin huppé ; cet oiseau, singulier par bien des traits, n’appartient pas à la même famille que les hoccos, et constitue pour le moment la seule espèce de son ordre]. Cuvier dit de cet oiseau : « Le nom d’Hoazin a été appliqué sans preuve à cet oiseau par Buffon, d’après une indication de Fernandez. »