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des personnes intelligentes, qui ont été à portée d’observer ces oiseaux, m’ont aussi assuré que ce changement de couleur avait lieu dans la plupart des femelles, qu’il commençait lorsqu’elles avaient quatre ans, temps où le mâle commençait aussi à prendre du dégoût pour elles et à les maltraiter ; qu’il leur venait alors de ces plumes longues et étroites, qui, dans le mâle, accompagnent les plumes de la queue ; en un mot, que plus elles avançaient en âge, plus elles devenaient semblables aux mâles, comme cela a lieu plus ou moins dans presque tous les animaux.

M. Edwards assure qu’on a vu pareillement chez le duc de Leeds une faisane commune dont le plumage était devenu semblable à celui du faisan mâle ; et il ajoute que de tels changements de couleurs n’ont guère lieu que parmi les oiseaux qui vivent dans la domesticité[1].

Les œufs de la faisane dorée ressemblent beaucoup à ceux de la peintade, et sont plus petits à proportion que ceux de la poule domestique, et plus rougeâtres que ceux de nos faisans.

Le docteur Hans Sloane a conservé un mâle environ quinze ans : il paraît que c’est un oiseau robuste, puisqu’il vit si longtemps hors de son pays ; il s’accoutume fort bien au nôtre[2], et y multiplie assez facilement ; il multiplie même avec notre faisane d’Europe. M. Leroy, lieutenant des chasses de Versailles, ayant mis une de ces faisanes de la Chine avec un coq faisan de ce pays-ci, il en a résulté deux faisans mâles fort ressemblants aux nôtres, cependant avec le plumage mal teint, et n’ayant que quelques plumes jaunes sur la tête comme le faisan de la Chine : ces deux jeunes mâles métis ayant été mis avec les faisanes d’Europe, l’un d’eux féconda la sienne la seconde année, et il en a résulté une poule faisane qui n’a jamais pu devenir féconde ; et les deux coqs métis n’ont rien produit de plus jusqu’à la quatrième année, temps où ils trouvèrent le moyen de s’échapper à travers leurs filets.

Il y a grande apparence que le tricolor huppé, dont il s’agit dans cet article, est ce beau faisan dont on dit que les plumes se vendent à la Chine plus cher que l’oiseau même[3] ; et que c’est aussi celui que Marco-Paolo admira dans un de ses voyages de la Chine, et dont la queue avait deux à trois pieds de long.

II.LE FAISAN NOIR ET BLANC DE LA CHINE.

La figure de nos planches enluminées n’a été dessinée que d’après l’oiseau empaillé, et je ne doute pas que celle de M. Edwards[4], qui a été faite et retouchée à loisir d’après le vivant, et recherchée pour les plus petits

  1. Edwards, Glanures, partie iiie, p. 268.
  2. Ibidem, planche lxviii.
  3. Histoire générale des Voyages, t. VI, p. 487.
  4. Voyez Edwards, Hist. nat. des oiseaux, planche lxvi.