Page:Buffon - Œuvres complètes, éd. Lanessan, 1884, tome V.djvu/406

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Je ne vois pas non plus pourquoi M. Brisson, confondant ces deux races en une seule, n’en fait qu’une variété du petit tétras à queue fourchue, puisque, indépendamment des deux différences que je viens d’indiquer, M. Linnæus dit positivement que son tétras pointillé de blanc est plus rare, plus sauvage, et qu’il a un cri tout autre, ce qui suppose, ce me semble, des différences plus caractérisées, plus profondes que celles qui d’ordinaire constituent une simple variété.

Il me paraîtrait plus raisonnable de séparer ces deux races ou espèces de petit tétras, dont l’une caractérisée par la queue pleine et les barbillons rouges, comprend le coq noir d’Écosse et la poule moresque de Turner ; et l’autre, ayant pour attributs ses petites taches blanches sur la poitrine, et son cri différent, serait formée du racklehane des Suédois. Ainsi l’on doit compter, ce me semble, quatre espèces différentes dans le genre des tétras ou coqs de bruyère : 1o le grand tétras ou grand coq de bruyère ; 2o le petit tétras ou coq de bruyère à queue fourchue ; 3o le racklan ou racklehane de Suède, indiqué par M. Linnæus ; 4o la poule moresque de Turner ou coq noir d’Écosse, avec des barbillons charnus des deux côtés du bec, et la queue pleine.

Et ces quatre espèces sont toutes originaires et naturelles aux climats du Nord, et habitent également dans les forêts de pins et de bouleaux ; il n’y a que la troisième, c’est-à-dire le racklehane de Suède, qu’on pourrait regarder comme une variété du petit tétras, si M. Linnæus n’assurait pas qu’il jette un cri tout différent.


LE PETIT TÉTRAS À PLUMAGE VARIABLE

Les grands tétras sont communs en Laponie, surtout lorsque la disette des fruits dont ils se nourrissent ou bien l’excessive multiplication de l’espèce les oblige de quitter les forêts de la Suède et de la Scandinavie pour se réfugier vers le nord[1] : cependant on n’a jamais dit qu’on eût vu dans ces climats glacés de grands tétras blancs ; les couleurs de leur plumage sont, par leur fixité et leur consistance, à l’épreuve de la rigueur du froid ; il en est de même des petits tétras noirs, qui sont aussi communs en Courlande et dans le nord de la Pologne que les grands le sont en Laponie ; mais le docteur Waygand[2], le jésuite Rzaczynski[3] et M. Klein[4], assurent qu’il y a en Courlande une autre espèce de petit tétras qu’ils appellent tétras blanc, quoiqu’il ne soit blanc qu’en hiver, et dont le plumage devient tous les ans

  1. Klein, Hist. avium, p. 173.
  2. Waygand, Actes de Breslaw, mois de novembre, année 1725.
  3. Rzaczynski, Auctuarium Hist. nat. Poloniæ, p. 422.
  4. Klein, Hist. Avium prodromus, p. 173.