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mais il en diffère par deux caractères très apparents : il est beaucoup moins gros et il a la queue fourchue, non seulement parce que les pennes ou grandes plumes du milieu sont plus courtes que les extérieures, mais encore parce que celles-ci se recourbent en dehors ; de plus, le mâle de cette petite espèce a plus de noir, et un noir plus décidé que le mâle de la grande espèce, et a de plus grands sourcils : j’appelle ainsi cette peau rouge et glanduleuse qu’il a au-dessus des yeux ; mais la grandeur de ces sourcils est sujette à quelque variation dans les mêmes individus, en différents temps, comme nous le verrons plus bas.

La femelle est une fois plus petite que le mâle[1] ; elle a la queue moins fourchue, et les couleurs de son plumage sont si différentes que Gesner s’est cru en droit d’en former une espèce séparée qu’il a désignée par le nom de grygallus minor, comme je l’ai remarqué ci-dessus dans l’histoire du grand tétras. Au reste, cette différence de plumage entre les deux sexes ne se décide qu’au bout d’un certain temps : les jeunes mâles sont d’abord de la couleur de leur mère, et conservent cette couleur jusqu’au premier automne ; sur la fin de cette saison, et pendant l’hiver, ils prennent des nuances de plus en plus foncées jusqu’à ce qu’ils soient d’un noir bleuâtre, et ils retiennent cette dernière couleur toute leur vie, sans autres changements que ceux que je vais indiquer : 1o ils prennent plus de bleu à mesure qu’ils avancent en âge ; 2o à trois ans, et non plus tôt, ils prennent une tache blanche sous le bec ; 3o lorsqu’ils sont très vieux, il paraît une autre tache d’un noir varié sous la queue, où auparavant les plumes étaient toutes blanches[2]. Charleton et quelques autres ajoutent qu’il y a d’autant moins de taches blanches à la queue que l’oiseau est plus vieux ; en sorte que le nombre plus ou moins grand de ces taches est un indice pour reconnaître son âge[3].

Les naturalistes, qui ont compté assez unanimement vingt-six pennes dans l’aile du petit tétras, ne s’accordent point entre eux sur le nombre des pennes de la queue, et l’on retrouve ici à peu près les mêmes variations dont j’ai parlé au sujet du grand tétras. Schwenckfeld, qui donne dix-huit pennes à la femelle, n’en accorde que douze au mâle. Willughby, Albin, M. Brisson, en assignent seize aux mâles comme aux femelles ; les deux mâles que nous conservons au cabinet du Roi en ont tous deux dix-huit ; savoir, sept grandes de chaque côté, et quatre dans le milieu beaucoup plus courtes ; ces différences viendraient-elles de ce que le nombre de ces grandes plumes est sujet à varier réellement, ou de ce que ceux qui les ont comptées ont négligé de s’assurer auparavant s’il n’en manquait aucune dans les sujets soumis à leurs observations ? Au reste, le tétras a les ailes courtes, et par conséquent le vol pesant, et on ne le voit jamais s’élever bien haut ni aller bien loin.

  1. British Zoology.
  2. Actes de Breslaw. Novembre 1725.
  3. Charleton, Exercitationes, p. 82.