dans la suite on pourra se contenter de leur donner toute sorte de fruits pourris coupés par morceaux[1], et surtout des fruits de ronces ou de mûriers blancs, etc. Lorsqu’on leur verra un air languissant, on leur mettra le bec dans du vin pour leur en faire boire un peu, et on leur fera avaler aussi un grain de poivre ; quelquefois ils paraissent engourdis et sans mouvement, lorsqu’ils ont été surpris par une pluie froide, et ils mourraient certainement, si on n’avait le soin de les envelopper de linges chauds, et de leur souffler à plusieurs reprises un air chaud par le bec : il ne faut pas manquer de les visiter de temps en temps, et de leur percer les petites vessies qui leur viennent sous la langue et autour du croupion, et de leur donner de l’eau de rouille ; on conseille même de leur laver la tête avec cette eau pour prévenir certaines maladies auxquelles ils sont sujets[2] ; mais, dans ce cas, il faut donc les essuyer et les sécher bien exactement, car on sait combien toute humidité est contraire aux dindons du premier âge.
La mère les mène avec la même sollicitude que la poule mène ses poussins ; elle les réchauffe sous ses ailes avec la même affection, elle les défend avec le même courage ; il semble que sa tendresse pour ses petits rende sa vue plus perçante ; elle découvre l’oiseau de proie d’une distance prodigieuse, et lorsqu’il est encore invisible à tous les autres yeux : dès qu’elle l’a aperçu, elle jette un cri d’effroi qui répand la consternation dans toute la couvée ; chaque dindonneau se réfugie dans les buissons ou se tapit dans l’herbe, et la mère les y retient en répétant le même cri d’effroi autant de temps que l’ennemi est à portée ; mais le voit-elle prendre son vol d’un autre côté, elle les en avertit aussitôt par un autre cri bien différent du premier, et qui est pour tous le signal de sortir du lieu où ils se sont cachés, et de se rassembler autour d’elle.
Lorsque les jeunes dindons viennent d’éclore, ils ont la tête garnie d’une espèce de duvet, et n’ont encore ni chair glanduleuse ni barbillons ; ce n’est qu’à six semaines ou deux mois que ces parties se développent, et, comme on le dit vulgairement, que les dindons commencent à pousser le rouge. Le temps de ce développement est un temps critique pour eux, comme celui de la dentition pour les enfants, et c’est alors surtout qu’il faut mêler du vin à leur nourriture pour les fortifier : quelque temps avant de pousser le rouge il commencent déjà à se percher.
Il est rare que l’on soumette les dindonneaux à la castration comme les poulets ; ils engraissent fort bien sans cela, et leur chair n’est pas moins bonne : nouvelle preuve qu’ils sont d’un tempérament moins chaud que les coqs ordinaires.
Lorsqu’ils sont devenus forts, ils quittent leur mère, ou plutôt ils en sont