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18o Les poules de Sansevare : ce sont celles qui donnent ces œufs qui se vendent en Perse trois ou quatre écus la pièce, et que les Persans s’amusent à choquer les uns contre les autres par manière de jeu : dans le même pays il y a des coqs beaucoup plus beaux et plus grands, et qui coûtent jusqu’à trois cents livres[1].

19o Le coq de Caux ou de Padoue : son attribut distinctif est la grosseur ; il a souvent la crête double en forme de couronne, et une espèce de huppe qui est plus marquée dans les poules ; leur voix est beaucoup plus forte, plus grave et plus rauque, et leur poids va jusqu’à huit à dix livres. On peut rapporter à cette belle race les grands coqs de Rhodes, de Perse[2], du Pégu[3], ces grosses poules de Bahia, qui ne commencent à se couvrir de plumes que lorsqu’elles ont atteint la moitié de leur grosseur[4] : on sait que les poussins de Caux prennent leurs plumes plus tard que les poussins ordinaires.

Au reste, il faut remarquer qu’un grand nombre d’oiseaux, dont parlent les voyageurs sous le nom de coqs ou de poules, sont de toute autre espèce : telles sont les poules patourdes ou palourdes qui se trouvent au Grand-Banc, et sont très friandes de foie de morue[5] ; le coq et la poule noire de Moscovie, qui sont coqs et poules de bruyère ; la poule rouge du Pérou, qui a beaucoup de rapport avec les faisans ; cette grosse poule à huppe de la Nouvelle-Guinée, dont le plumage est bleu céleste, qui a le bec de pigeon, les pieds de poule commune, qui niche sur les arbres[6], et qui est probablement le faisan de Banda ; la poule de Damiette, qui a le bec et les pieds rouges, une petite marque sur la tête de la même couleur, et le plumage d’un bleu violet, ce qui pourrait se rapporter à la grande poule d’eau ; la poule du Delta, dont Thévenot vante les belles couleurs, mais qui diffère des gallinacés, non seulement par la forme du bec et de la queue, mais encore par les habitudes naturelles, puisqu’elle se plaît dans les marécages ; la poule de Pharaon, que le même Thévenot dit ne le point céder à la gelinotte ; les poules de Corée, qui ont une queue de trois pieds de longueur, etc.

Dans ce grand nombre de races différentes que nous présente l’espèce du coq, comment pourrons-nous démêler quelle en est la souche primitive ? Tant de circonstances ont influé sur ces variétés, tant de hasards ont concouru pour les produire ! Les soins et même les caprices de l’homme les ont si fort multipliées, qu’il paraît bien difficile de remonter à leur pre-

  1. Voyage de Tavernier, t. II, p. 43 et 44.
  2. Chardin, t. II, p. 24.
  3. Recueil des Voyages qui ont servi à l’établissement de la Compagnie des Indes, t. III, p. 71.
  4. Nouveau Voyage de Dampier, t. III, p. 68.
  5. Recueil des Voyages du Nord, t. III, p. 15.
  6. Hist. générale des Voyages, t. XI, p. 230.