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rents degrés de rapidité, sa direction même de bas en haut et de haut en bas dépendent de la combinaison de tous les résultats de cette conformation. Les oiseaux dont l’aile et la queue sont plus longues et le corps plus petit sont ceux qui volent le plus vite et le plus longtemps ; ceux au contraire qui, comme l’outarde, le casoar ou l’autruche, ont les ailes et la queue courtes, avec un grand volume de corps, ne s’élèvent qu’avec peine ou même ne peuvent quitter la terre.

La force des muscles, la conformation des ailes, l’arrangement des plumes et la légèreté des os, sont les causes physiques de l’effet du vol, qui paraît fatiguer si peu la poitrine de l’oiseau, que c’est souvent dans ce temps même du vol qu’il fait le plus retentir sa voix par des cris continus ; c’est que, dans l’oiseau, le thorax avec toutes les parties qui en dépendent ou qu’il contient, est plus fort et plus étendu à l’intérieur et à l’extérieur qu’il ne l’est dans les autres animaux ; de même que les muscles pectoraux placés à l’extérieur sont plus gros, la trachée-artère est plus grande et plus forte, elle se termine ordinairement au-dessous en une large cavité qui multiplie le volume du son. Les poumons, plus grands, plus étendus que ceux des quadrupèdes, ont plusieurs appendices qui forment des poches[NdÉ 1], des espèces de réservoirs d’air qui rendent encore le corps de l’oiseau plus léger[NdÉ 2], en même temps qu’ils fournissent aisément et abondamment la substance aérienne qui sert d’aliment à la voix. On a vu, dans l’histoire de l’ouarine, qu’une assez légère différence, une extension de plus dans les parties solides de l’organe, donne à ce quadrupède, qui n’est que d’une grandeur médiocre, une voix si facile et si forte, qu’il la fait retentir presque

  1. Ces poches communiquent avec les poumons. Chaque poumon présente cinq grands orifices par lesquels les branches s’ouvrent dans les sacs aériens. Les sacs sont au nombre de neuf : quatre sont logés dans la cavité thoracique ; cinq sont situés en dehors de cette cavité. Chez certains oiseaux, l’air venu des poumons se répand en outre sous la peau, dans de vastes cavités communiquant toutes les unes avec les autres. Il en est ainsi, notamment, chez le Fou et le Pélican.
  2. Il est bien démontré, en effet, que les sacs aériens ont pour effet de diminuer la densité des oiseaux et d’agir, chez les oiseaux aériens, à la façon d’un aérostat auquel l’animal serait fixé ; mais la diminution de densité paraît être encore plus sensible chez les oiseaux aquatiques. M. Bert pense même que chez les plongeurs le mouvement de culbute est favorisé par un déplacement de l’air alternativement d’avant en arrière et d’arrière en avant. « Veuillez remarquer, dit-il (Lec. sur la physiol. comparée de la respiration., p. 328), ce qui vient à l’appui de cette hypothèse, que, chez ces oiseaux plongeurs (Canard Milouin, Foulque), le sac interclaviculaire, fort bombé en avant, est revêtu d’une couche musculaire épaisse, parfaitement capable de le comprimer et de le vider en partie en rejetant en arrière l’air qu’il contient. Cette projection s’exécutant au moment même où l’animal lance sa tête en bas et en avant, peut très bien, en amenant plus en avant le centre de gravité, favoriser la culbute ; l’inverse aura lieu lorsque l’oiseau, plongé sous l’eau, contractera ses muscles abdominaux et projettera en avant l’air contenu dans ses grands réservoirs postérieurs. »

    Les poches pulmonaires sont disposées de telle sorte qu’à chaque aspiration il entre dans les poumons à la fois de l’air venant du dehors et de l’air provenant des réservoirs situés en dehors de la cage thoracique.