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deur et le plumage, au lanier » ; peut-être aussi le faucon de Tartarie[1], qui, au contraire, est un peu plus grand que le faucon pèlerin, et que Belon dit en différer encore en ce que le dessous de ses ailes est roux et que ses doigts sont plus allongés.

En rassemblant et resserrant les différents objets que nous venons de présenter en détail, il paraît : 1o qu’il n’y a en France qu’une seule espèce de faucon bien connue pour y faire son aire dans nos provinces montagneuses ; que cette même espèce se trouve en Suisse, en Allemagne, en Pologne et jusqu’en Islande vers le Nord, en Italie[2], en Espagne et dans les îles de la Méditerranée, et peut-être jusqu’en Égypte[3] vers le Midi ; 2o que le faucon blanc n’est dans cette même espèce qu’une variété produite par l’influence du climat du Nord ; 3o que le faucon gentil n’est pas d’une espèce différente de notre faucon commun[4] ; 4o que le faucon pèlerin ou passager est d’une espèce différente qu’on doit regarder comme étrangère et qui peut-être renferme quelques variétés, telles que le faucon de Barbarie, le faucon tunisien, etc. Il n’y a donc, quoi qu’en disent les nomenclateurs, que deux espèces réelles de faucons en Europe, dont la première est naturelle à notre climat et se multiplie chez nous, et l’autre qui ne fait qu’y passer et qu’on doit regarder comme étrangère. En rappelant donc à l’examen la liste la plus nombreuse de nos nomenclateurs, au sujet des faucons, et suivant article par article celle de M. Brisson, nous trouverons : 1o que le faucon-sors n’est que le jeune de l’espèce commune ; 2o que le faucon-hagard n’en est que le vieux ; 3o que le faucon à tête blanche et à pieds pattus est une variété ou race constante dans cette même espèce ; 4o sous le nom de faucon blanc, M. Brisson indique deux différentes espèces d’oiseaux, et peut-être trois, car le premier et le troisième pourraient être, absolument parlant, des faucons qui auraient subi la variété commune aux oiseaux du Nord, qui est le blanc ; mais pour le second, dont M. Brisson ne paraît parler que d’après M. Frisch, dont il cite la planche lxxx, ce n’est certainement pas un faucon, mais un oiseau de rapine, commun en France, auquel on donne le nom de harpaye ; 5o que le faucon noir est le véritable faucon pèlerin ou passager, qu’on doit regarder comme étranger ; 6o que

  1. Belon, p. 116.
  2. Aldrov., Avi., t. Ier, p. 429.
  3. Prosper Alpin, Ægypt., t. Ier, p. 200.
  4. Jean de Franchières, qui est l’un des plus anciens et peut-être le meilleur de nos auteurs sur la fauconnerie, ne compte que sept espèces d’oiseaux auxquels il donne le nom de faucon, savoir : le faucon gentil, le faucon pèlerin, le faucon tartaret, le gerfaut, le sacre, le lanier et le faucon tunisien ou tunicien : en retranchant de cette liste le gerfaut, le sacre et le lanier, qui ne sont pas proprement des faucons, il ne reste que le faucon gentil et le faucon pèlerin, dont le tartaret et le tunisien sont deux variétés. Cet auteur ne connaissait donc qu’une seule espèce de faucon naturelle en France, qu’il indique sous le nom de faucon gentil, et cela prouve encore ce que j’ai avancé, que le faucon gentil et le faucon commun ne font tous deux qu’une seule et même espèce.