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ce n’est que par une comparaison du sac qu’il croyait avoir vu se former dans la matrice des vivipares avec le revêtement et l’accroissement des œufs dans celle des ovipares, qu’il a dit que tous venaient d’un œuf, et il n’a fait que répéter à cet égard ce qu’Aristote avait dit avant lui. Le premier qui ait découvert les prétendus œufs dans les ovaires des femelles est Stenon : dans la dissection qu’il fit d’un chien de mer femelle, il vit, dit-il, des œufs dans les testicules, quoique cet animal soit, comme l’on sait, vivipare ; et il ajoute qu’il ne doute pas que les testicules des femmes ne soient analogues aux ovaires des ovipares, soit que les œufs des femmes tombent, de quelque façon que ce puisse être, dans la matrice, soit qu’il n’y tombe que la matière contenue dans ces œufs. Cependant, quoique Stenon soit le premier auteur de la découverte de ces prétendus œufs, Graaf a voulu se l’attribuer, et Swammerdam la lui a disputée, même avec aigreur ; il a prétendu que Van-Hom avait aussi reconnu ces œufs avant Graaf : il est vrai qu’on peut reprocher à ce dernier d’avoir assuré positivement plusieurs choses que l’expérience a démenties, et d’avoir prétendu qu’on pouvait juger du nombre des fœtus contenus dans la matrice par le nombre des cicatrices ou follicules vides de l’ovaire, ce qui n’est point vrai, comme on peut le voir par les expériences de Verrheyen (t. II, chap. iii, édit. de Bruxelles, 1710), par celles de M. Méry (Hist. de l’Acad., 1701), et par quelques-unes des propres expériences de Graaf, où, comme nous l’avons remarqué, il s’est trouvé moins d’œufs dans la matrice que de cicatrices sur les ovaires. D’ailleurs, nous ferons voir que ce qu’il dit sur la séparation des œufs et sur la manière dont ils descendent dans la matrice n’est point exact, que même il n’est point vrai que ces œufs existent dans les testicules des femelles, qu’on ne les a jamais vus, que ce qu’on voit dans la matrice n’est point un œuf, et que rien n’est plus mal fondé que les systèmes qu’on a voulu établir sur les observations de ce fameux anatomiste.

Cette prétendue découverte des œufs dans les testicules des femelles attira l’attention de la plupart des autres anatomistes ; ils ne trouvèrent cependant que des vésicules dans les testicules de toutes les femelles vivipares sur lesquelles ils purent faire des observations, mais ils n’hésitèrent pas à regarder ces vésicules comme des œufs ; ils donnèrent aux testicules le nom d’ovaires, et aux vésicules qu’ils contiennent le nom d’œufs ; ils dirent aussi, comme Graaf, que dans le même ovaire ces œufs sont de différentes grosseurs, que les plus gros dans les ovaires des femmes ne sont pas de la grosseur d’un petit pois, qu’ils sont très petits dans les jeunes personnes de quatorze ou quinze ans, mais que l’âge et l’usage des hommes les fait grossir ; qu’on en peut compter plus de vingt dans chaque ovaire ; que ces œufs sont fécondés dans l’ovaire par la partie spiritueuse de la liqueur séminale du mâle, qu’ensuite ils se détachent et tombent dans la matrice par les trompes de Fallope, où le fœtus est formé de la substance intérieure de l’œuf, et le placenta de la