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Avant que de répondre à cette demande, je ne puis m’empêcher d’observer qu’une des premières choses qui m’aient frappé lorsque j’ai commencé à faire des réflexions suivies sur la génération, c’est que tous ceux qui ont fait des recherches et des systèmes sur cette matière se sont uniquement attachés à la génération de l’homme et des animaux ; ils ont rapporté à cet objet toutes leurs idées, et n’ayant considéré que cette génération particulière, sans faire attention aux autres espèces de générations que la nature nous offre, ils n’ont pu avoir d’idées générales sur la reproduction ; et, comme la génération de l’homme et des animaux est de toutes les espèces de générations la plus compliquée, ils ont eu un grand désavantage dans leurs recherches, parce que non seulement ils ont attaqué le point le plus difficile et le phénomène le plus compliqué, mais encore parce qu’ils n’avaient aucun sujet de comparaison dont il leur fût possible de tirer la solution de la question : c’est à cela principalement que je crois devoir attribuer le peu de succès de leurs travaux sur cette matière ; au lieu que je suis persuadé que par la route que j’ai prise on peut arriver à expliquer d’une manière satisfaisante les phénomènes de toutes les espèces de générations.

Celle de l’homme va nous servir d’exemple : je le prends dans l’enfance, et je conçois que le développement ou l’accroissement des différentes parties de son corps se faisant par la pénétration intime des molécules organiques analogues à chacune de ses parties, toutes ces molécules organiques sont absorbées dans le premier âge et entièrement employées au développement, que par conséquent il n’y en a que peu ou point de superflues, tant que le développement n’est pas achevé, et que c’est pour cela que les enfants sont incapables d’engendrer ; mais, lorsque le corps a pris la plus grande partie de son accroissement, il commence à n’avoir plus besoin d’une aussi grande quantité de molécules organiques pour se développer ; le superflu de ces mêmes molécules organiques est donc renvoyé de chacune des parties du corps dans des réservoirs destinés à les recevoir ; ces réservoirs sont les testicules et les vésicules séminales : c’est alors que commence la puberté, dans le temps, comme on voit, où le développement du corps est à peu près achevé ; tout indique alors la surabondance de la nourriture, la voix change et grossit, la barbe commence à paraître, plusieurs autres parties du corps se couvrent de poil, celles qui sont destinées à la génération prennent un prompt accroissement, la liqueur séminale arrive et remplit les réservoirs qui lui sont préparés, et, lorsque la plénitude est trop grande, elle force, même sans aucune provocation et pendant le sommeil, la résistance des vaisseaux qui la contiennent pour se répandre au dehors ; tout annonce donc dans le mâle une surabondance de nourriture dans le temps que commence la puberté ; celle de la femelle est encore plus précoce, et cette surabondance y est même plus marquée par cette évacuation périodique qui commence et finit en même temps que la puissance d’engendrer, par le prompt accroisse-