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on peut les comparer, sont couverts de poil, et en diffèrent trop pour qu’on puisse les réunir à la même famille.

Des neuf espèces isolées, sept, savoir : l’éléphant, le rhinocéros, l’hippopotame, la girafe, le chameau, le lion et le tigre, ne se trouvent que dans l’ancien monde ; et deux, savoir : l’ours et la taupe, sont communes aux deux continents.

Si nous faisons de même le dénombrement des animaux propres et particuliers au nouveau monde, nous trouverons qu’il y en a environ cinquante espèces différentes, que l’on peut réduire à dix genres, et quatre espèces isolées : ces quatre espèces sont le tapir, le cabiai, le lama et le pécari ; encore n’y a-t-il que l’espèce du tapir qui soit absolument isolée, car celle du pécari a des variétés, et l’on peut réunir la vigogne au lama, et peut-être le cochon d’Inde au cabiai. Les dix genres sont : 1o les sapajous, huit espèces ; 2o les sagouins, six espèces ; 3o les philandres ou sarigues, marmoses, cayopollins, phalangers, tarsiers, etc. ; 4o les jaguars, couguars, ocelots, margais, etc. ; 5o les coatis, trois ou quatre espèces ; 6o les mouffettes, quatre ou cinq espèces ; 7o le genre de l’agouti, dans lequel je comprends l’acouchi, le paca, l’apéréa et le tapéti ; 8o celui des tatous, qui est composé de sept ou huit espèces ; 9o les fourmiliers, deux ou trois espèces, et 10o les paresseux, dont nous connaissons deux espèces, savoir : l’unau et l’aï.

Or, ces dix genres et ces quatre espèces isolées, auxquels on peut réduire les cinquante espèces d’animaux qui sont particuliers au nouveau monde, quoique toutes différentes de celles de l’ancien continent, ont cependant des rapports éloignés qui paraissent indiquer quelque chose de commun dans leur formation, et qui nous conduisent à remonter à des causes de dégénération plus grandes et peut-être plus anciennes que toutes les autres. Nous avons dit qu’en général tous les animaux du nouveau monde étaient beaucoup plus petits que ceux de l’ancien continent ; cette grande diminution dans la grandeur, quelle qu’en soit la cause, est une première sorte de dégénération qui n’a pu se faire sans beaucoup influer sur la forme, et il ne faut pas perdre de vue ce premier effet dans les comparaisons que l’on voudra faire de tous ces animaux.

Le plus grand est le tapir, qui, quoiqu’il ne soit que de la taille d’un âne, ne peut cependant être comparé qu’à l’éléphant, au rhinocéros et à l’hippopotame ; il est, dans son continent, le premier pour la grandeur, comme l’éléphant l’est dans le sien ; il a, comme le rhinocéros, la lèvre supérieure musculeuse et avancée, et, comme l’hippopotame, il se tient souvent dans l’eau. Seul, il les représente tous trois à ces petits égards, et sa forme, qui en tout tient plus de celle de l’âne que d’aucune autre, semble être aussi dégradée que sa taille est diminuée. Le cheval, l’âne, le zèbre, l’éléphant, le rhinocéros et l’hippopotame n’existaient point en Amérique, et n’y avaient même aucun représentant, c’est-à-dire qu’il n’y avait dans ce nouveau