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czgithai par les Tartares Mongoux, est probablement le même animal que l’onagre des autres provinces de l’Asie ; il n’en diffère que par la longueur et les couleurs du poil, qui, selon M. Bell, paraît ondé de brun et de blanc[1] : ces onagres czigithais se trouvent dans les forêts de la Tartarie jusqu’aux cinquante-unième et cinquante-deuxième degrés, et il ne faut pas les confondre avec les zèbres, dont les couleurs sont bien plus vives et bien autrement tranchées, et qui d’ailleurs forment une espèce particulière presque aussi différente de celle de l’âne que de celle du cheval. La seule dégénération remarquable dans l’âne en domesticité, c’est que sa peau s’est ramollie et qu’elle a perdu les petits tubercules qui se trouvent semés sur la peau de l’onagre, de laquelle les Levantins font le cuir grenu qu’on appelle chagrin.

Le lièvre est d’une nature flexible et ferme en même temps, car il est répandu dans presque tous les climats de l’ancien continent, et partout il est à très peu près le même ; seulement son poil blanchit pendant l’hiver dans les climats très froids, et il reprend en été sa couleur naturelle, qui ne varie que du fauve au roux ; la qualité de la chair varie de même ; les lièvres les plus rouges sont toujours les meilleurs à manger. Mais le lapin, sans être d’une nature aussi flexible que le lièvre, puisqu’il est beaucoup moins répandu, et que même il paraît confiné à de certaines contrées, est néanmoins sujet à plus de variétés, parce que le lièvre est sauvage partout, au lieu que le lapin est presque partout à demi domestique. Les lapins clapiers ont varié pour la couleur du fauve au gris, au blanc, au noir ; ils ont aussi varié par la grandeur, la quantité, la qualité du poil : cet animal, qui est originaire d’Espagne, a pris en Tartarie une queue longue, en Syrie du poil touffu et pelotonné comme du feutre, etc. On trouve quelquefois des lièvres noirs dans les pays froids ; on prétend aussi qu’il y a dans la Norvège et dans quelques autres provinces du Nord des lièvres qui ont des cornes[NdÉ 1]. M. Klein[2] a fait graver deux de ces lièvres cornus : il est aisé de juger à l’inspection des figures que ces cornes sont des bois semblables au bois du chevreuil ; cette variété, si elle existe, n’est qu’individuelle et ne se manifeste probablement que dans les endroits où le lièvre ne trouve point

  1. « In the forests near Kuznetsky on the river Tom one of the sources of the river Oby in lat. 51 et 52 are wild asses. I have seen many of their skins ; they have in all respects the shape of the head, tail and hoofs of the common ass, but their skin is waved and undulated white and brown. » Bell’s Travels to China. — Nota. Il se pourrait que M. Bell, qui dit n’avoir observé que les peaux de ces animaux, ait vu des peaux de zèbres ; car les autres voyageurs ne disent pas que les czigithais ou onagres de Daurie soient, comme le zèbre, rayés de brun et de blanc ; d’ailleurs, il y a au cabinet de Pétersbourg des peaux de zèbres et des peaux de czigithais, qu’on montre également aux voyageurs.
  2. Klein, De quad., p. 52, tab. iii, fig.  ad § xxi.
  1. C’est une simple légende populaire.