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donc croire qu’ils sont de la même nature, et qu’ils sont seulement plus fixes et plus solides que ces filaments de la liqueur séminale.

Voilà ce que j’ai dit, au sujet de la décomposition du blé ergoté. Cela me paraît assez précis et même tout à fait assez détaillé ; cependant je viens de recevoir une lettre de M. l’abbé Luc Magnanima, datée de Livourne, le 30 mai 1775, par laquelle il m’annonce, comme une grande et nouvelle découverte de M. l’abbé Fontana, ce que l’on vient de lire et que j’ai publié il y a plus de trente ans. Voici les termes de cette lettre : « Il sig. Abate Fontana, Fisico di S. A. R. a fatto stampare, poche settimane sono, una lettera nella quale egli publica due scoperte che debbon sosprendere chiunque. La prima versa intorno a quella malattia del grano che i Francese chiamano ergot, e noi grano cornuto… Ha trovato, colla prima scoperta, il sig. Fontana, che si ascondono in quella malattia del grano alcune anguillette, o serpentelli, i quali morti che sieno, posson tornare a vivere mille e mille volte, e non con altro mezzo che con una semplice goccia d’acqua ; si dira che non eran fosse morti quando si e preteso che tornino in vita. Questo si e pensato dall’observatore stesso, e per accertarsi che eran morti di fatto, colla punta di un ago et gli ha tentati, e gli ha veduti andarsene in cenere. »

Il faut que MM. les abbés Magnanima et Fontana n’aient pas lu ce que j’ai écrit à ce sujet, ou qu’ils ne se soient pas souvenus de ce petit fait, puisqu’ils donnent cette découverte comme nouvelle ; j’ai donc tout droit de la revendiquer, et je vais y ajouter quelques réflexions.

C’est travailler pour l’avancement des sciences que d’épargner du temps à ceux qui les cultivent ; je crois donc devoir dire à ces observateurs qu’il ne suffit pas d’avoir un bon microscope pour faire des observations qui méritent le nom de découvertes. Maintenant qu’il est bien reconnu que toute substance organisée contient une infinité de molécules organiques vivantes et présente encore après sa décomposition les mêmes particules vivantes ; maintenant que l’on sait que ces molécules organiques ne sont pas de vrais animaux, et qu’il y a dans ce genre d’êtres microscopiques autant de variétés et de nuances que la nature en a mis dans toutes ses autres productions, les découvertes qu’on peut faire au microscope se réduisent à bien peu de chose, car on voit de l’œil de l’esprit et sans microscope l’existence réelle de tous ces petits êtres dont il est inutile de s’occuper séparément ; tous ont une origine commune et aussi ancienne que la nature ; ils en constituent la vie et passent de moules en moules pour la perpétuer. Ces molécules organiques toujours actives, toujours subsistantes, appartiennent également à tous les êtres organisés, aux végétaux comme aux animaux ; elles pénètrent la matière brute, la travaillent, la remuent dans toutes ses dimensions, et la font servir de base au tissu de l’organisation, de laquelle ces molécules vivantes sont les seuls principes et les seuls instruments ; elles ne sont soumises qu’à