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plus funestes effets ; car si cette évacuation n’est pas favorisée par l’usage du mâle et par la conception qui doit en résulter, tout le système sexuel tombe en irritation et arrive à un tel érétisme que quelquefois la mort s’ensuit et souvent la démence.

C’est à ce travail continuel des testicules de la femme, travail causé par la germination et l’oblitération presque continuelle de ces corps glanduleux, qu’on doit attribuer la cause d’un grand nombre des maladies du sexe. Les observations recueillies par les médecins anatomistes, sous le nom de maladies des ovaires, sont peut-être en plus grand nombre que celles des maladies de toute autre partie du corps, et cela ne doit pas nous surprendre, puisque l’on sait que ces parties ont plus que les autres, et indépendamment de leur nutrition, un travail particulier presque continuel, qui ne peut s’opérer qu’à leurs dépens, leur faire des blessures et finir par les charger de cicatrices.

Les vésicules qui composent presque toute la substance des testicules des femelles, et qu’on croyait jusqu’à nos jours être les œufs des vivipares, ne sont rien autre chose que les réservoirs d’une lymphe épurée, qui fait la première base de la liqueur séminale : cette lymphe, qui remplit les vésicules, ne contient encore aucune molécule animée, aucun atome vivant ou se mouvant ; mais dès qu’elle a passé par le filtre du corps glanduleux et qu’elle est déposée dans sa cavité, elle change de nature ; car dès lors elle paraît composée, comme la liqueur séminale du mâle, d’un nombre infini de particules organiques vivantes et toutes semblables à celles que l’on observe dans la liqueur évacuée par le mâle, ou tirée de ses vésicules séminales. C’était donc par une illusion bien grossière que les anatomistes modernes, prévenus du système des œufs, prenaient ces vésicules, qui composent la substance et forment l’organisation des testicules, pour les œufs des femelles vivipares ; et c’était non seulement par une fausse analogie qu’on avait transporté le mode de la génération des ovipares aux vivipares, mais encore par une grande erreur qu’on attribuait à l’œuf presque toute la puissance et l’effet de la génération. Dans tous les genres, l’œuf, selon ces physiciens anatomistes, contenait le dépôt sacré des germes préexistants, qui n’avaient besoin pour se développer que d’être excités par l’esprit séminal (aura seminalis) du mâle ; les œufs de la première femelle contenaient non seulement les germes des enfants qu’elle devait ou pouvait produire, mais ils renfermaient encore tous les germes de sa postérité, quelque nombreuse et quelque éloignée qu’elle pût être. Rien de plus faux que toutes ces idées ; mes expériences ont clairement démontré qu’il n’existe point d’œuf dans les femelles vivipares, qu’elles ont comme le mâle leur liqueur séminale, que cette liqueur réside dans la cavité des corps glanduleux, qu’elle contient, comme celle des mâles, une infinité de molécules organiques vivantes. Ces mêmes expériences démontrent de plus que les femelles ovipares ont, comme les vivipares, leur liqueur séminale toute semblable à celle du mâle ; que cette semence de la