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CHAPITRE II

DE LA REPRODUCTION EN GÉNÉRAL

Examinons de plus près cette propriété commune à l’animal et au végétal, cette puissance de produire son semblable, cette chaîne d’existences successives d’individus qui constitue l’existence réelle de l’espèce ; et, sans nous attacher à la génération de l’homme ou à celle d’une espèce particulière d’animal, voyons en général les phénomènes de la reproduction, rassemblons des faits pour nous donner des idées, et faisons l’énumération des différents moyens dont la nature fait usage pour renouveler les êtres organisés. Le premier moyen, et, selon nous, le plus simple de tous, est de rassembler dans un être une infinité d’êtres organiques semblables, et de composer tellement sa substance qu’il n’y ait pas une partie qui ne contienne un germe de la même espèce et qui, par conséquent, ne puisse elle-même devenir un tout semblable à celui dans lequel elle est contenue. Cet appareil paraît d’abord supposer une dépense prodigieuse et entraîner la profusion ; cependant ce n’est qu’une magnificence assez ordinaire à la nature, et qui se manifeste même dans des espèces communes et inférieures, telles que sont les vers, les polypes, les ormes, les saules, les groseilliers et plusieurs autres plantes et insectes dont chaque partie contient un tout, qui, par le seul développement, peut devenir une plante ou un insecte. En considérant sous ce point de vue les êtres organisés et leur reproduction, un individu n’est qu’un tout uniformément organisé dans toutes ses parties intérieures, un composé d’une infinité de figures semblables et de parties similaires, un assemblage de germes ou de petits individus de la même espèce, lesquels peuvent tous se développer de la même façon, suivant les circonstances, et former de nouveaux touts composés comme le premier[NdÉ 1].

  1. Buffon n’a que des idées très vagues sur la constitution intime des êtres vivants. On ignorait, à son époque, que tous les végétaux et les animaux sont composés de cellules, c’est-à-dire d’individualités primaires, très simples, jouissant de toutes les propriétés à l’ensemble desquelles nous donnons le nom de vie, se nourrissant, se multipliant et constituant, je le répète, de véritables individus. Mais, si Buffon ignorait ces faits, il est bien manifeste, à la lecture de ce chapitre, qu’il les avait en quelque sorte soupçonnés et devinés. Il est même assez facile de se rendre compte, par la lecture de la première page du cha-