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dire, monstrueuse, si on la compare à celle qu’ils ont ordinairement ; dans les mâles des vivipares, les testicules se gonflent aussi assez considérablement dans les espèces qui ont un temps de rut marqué ; et en général, dans toutes les espèces, il y a de plus un gonflement et une extension du membre génital, qui, quoiqu’elle soit passagère et extérieure au corps de l’animal, doit cependant être regardée comme une production nouvelle qui précède nécessairement toute génération.

Dans le corps de chaque animal, soit mâle, soit femelle, il se forme donc de nouvelles productions qui précèdent la génération ; ces productions nouvelles sont ordinairement des parties particulières, comme les œufs, les corps glanduleux, les laites, etc., et quand il n’y a pas de production réelle, il y a toujours un gonflement et une extension très considérables dans quelques-unes des parties qui servent à la génération ; mais dans d’autres espèces, non seulement cette production nouvelle se manifeste dans quelques parties du corps, mais même il semble que le corps entier se reproduise de nouveau avant que la génération puisse s’opérer : je veux parler des insectes et de leurs métamorphoses. Il me paraît que ce changement, cette espèce de transformation qui leur arrive n’est qu’une production nouvelle qui leur donne la puissance d’engendrer ; c’est au moyen de cette production que les organes de la génération se développent et se mettent en état de pouvoir agir, car l’accroissement de l’animal est pris en entier avant qu’il se transforme ; il cesse alors de prendre de la nourriture, et le corps sous cette première forme n’a aucun organe pour la génération, aucun moyen de transformer cette nourriture, dont ces animaux ont une quantité fort surabondante, en œufs et en liqueur séminale ; et dès lors cette quantité surabondante de nourriture, qui est plus grande dans les insectes que dans aucune autre espèce d’animal, se moule et se réunit tout entière, d’abord sous une forme qui dépend beaucoup de celle de l’animal même, et qui y ressemble en partie : la chenille devient papillon, parce que n’ayant aucun organe, aucun viscère capable de contenir le superflu de la nourriture, et ne pouvant par conséquent produire de petits êtres organisés semblables au grand, cette nourriture organique, toujours active, prend une autre forme en se joignant en total selon les combinaisons qui résultent de la figure de la chenille, et elle forme un papillon dont la figure répond en partie, et même pour la constitution essentielle, à celle de la chenille, mais dans lequel les organes de la génération sont développés et peuvent recevoir et transmettre les parties organiques de la nourriture qui forment les œufs et les individus de l’espèce, qui doivent, en un mot, opérer la génération ; et les individus qui proviennent du papillon ne doivent pas être des papillons, mais des chenilles, parce qu’en effet c’est la chenille qui a pris la nourriture, et que les parties organiques de cette nourriture se sont assimilées à la forme de la chenille et non pas à celle du papillon, qui n’est qu’une production accidentelle de cette