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vu de végétal produire un animal : ces corps mouvants se trouvent aussi bien dans les germes des plantes que dans la liqueur séminale des animaux ; on les trouve dans toutes les substances végétales ou animales ; ces corps mouvants ne sont donc pas des animaux : ils ne se produisent pas par les voies de la génération ; ils n’ont pas d’espèce constante ; ils ne peuvent donc être ni des animaux, ni des végétaux. Que seront-ils donc ? On les trouve partout, dans la chair des animaux, dans la substance des végétaux ; on les trouve en plus grand nombre dans les semences des uns et des autres : n’est-il pas naturel de les regarder comme des parties organiques vivantes qui composent l’animal ou le végétal, comme des parties qui ayant du mouvement et une espèce de vie doivent produire par leur réunion des êtres mouvants et vivants, et former les animaux et les végétaux ?

Mais, pour laisser sur cela le moins de doute que nous pourrons, examinons les observations des autres. Peut-on dire que les machines actives que M. Needham a trouvées dans la laite du calmar soient des animaux ? Pourrait-on croire que les œufs qui sont des machines actives d’une autre espèce soient aussi des animaux ? Et si nous jetons les yeux sur la représentation de presque tous les corps en mouvement que Leeuwenhoek a vus au microscope dans une infinité de différentes matières, ne reconnaîtrons-nous pas, même à la première inspection, que ces corps ne sont pas des animaux, puisque aucun d’eux n’a de membre, et qu’ils sont tous, ou des globules, ou des ovales plus ou moins allongés, plus ou moins aplatis ? Si nous examinons ensuite ce que dit ce célèbre observateur lorsqu’il décrit le mouvement de ces prétendus animaux, nous ne pourrons plus douter qu’il n’ait eu tort de les regarder comme tels, et nous nous confirmerons de plus en plus dans notre opinion, que ce sont seulement des parties organiques en mouvement. Nous en rapporterons ici plusieurs exemples. Leeuwenhoek donne (t. Ier, p. 51) la figure des corps mouvants qu’il a observés dans la liqueur des testicules d’une grenouille mâle. Cette figure ne représente rien qu’un corps menu, long et pointu par l’une des extrémités, et voici ce qu’il en dit : « Uno tempore caput (c’est ainsi qu’il appelle l’extrémité la plus grosse de ce corps mouvant) crassiùs mihi apparebat alio ; plerumque agnoscebam animalculum haud ulteriùs quàm à capite ad medium corpus, ob caudæ tenuitatem, et cùm idem animalculum paulò vehementiùs moveretur (quod tamen tardè flebat) quasi volumine quodam circà caput ferebatur. Corpus ferè carebat motu, cauda tamen in tres quatuorve flexus volvebatur. » Voilà le changement de forme que j’ai dit avoir observé, voilà le mucilage dont le corps mouvant fait effort pour se dégager ; voilà une lenteur dans le mouvement lorsque ces corps ne sont pas dégagés de leur mucilage ; et, enfin, voilà un animal, selon Leeuwenhoek, dont une partie se meut et l’autre demeure en repos, dont l’une est vivante et l’autre morte ; car il dit plus bas : « Movebant posteriorem solùm partem ; quæ ultima, morti vicina