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Ces animalcules sont, disent-ils, de différente figure dans les différentes espèces d’animaux ; cependant ils sont tous longs, menus et sans membres, ils se meuvent avec rapidité et en tous sens ; la matière qui contient ces animaux est, comme je l’ai dit, beaucoup plus pesante que le sang. De la semence de taureau a donné à Verheyen, par la chimie, d’abord du phlegme, ensuite une quantité assez considérable d’huile fétide, mais peu de sel volatil en proportion, et beaucoup plus de terre qu’il n’aurait cru. (Voyez Verheyen, Sup. anat., t. II, p. 69.) Cet auteur paraît surpris de ce qu’en rectifiant la liqueur distillée il ne put en tirer des esprits ; et, comme il était persuadé que la semence en contient une grande quantité, il attribue leur évaporation à leur trop grande subtilité ; mais ne peut-on pas croire, avec plus de fondement, qu’elle n’en contient que peu ou point du tout ? La consistance de cette matière et son odeur n’annoncent pas qu’il y ait des esprits ardents, qui d’ailleurs ne se trouvent en abondance que dans les liqueurs fermentées ; et à l’égard des esprits volatils, on sait que les cornes, les os et les autres parties solides des animaux en donnent plus que toutes les liqueurs du corps animal. Ce que les anatomistes ont donc appelé esprits séminaux, aura seminalis, pourrait bien ne pas exister, et certainement ce ne sont pas ces esprits qui agitent les particules qu’on voit se mouvoir dans les liqueurs séminales ; mais, pour qu’on soit plus en état de prononcer sur la nature de la semence et sur celle des animaux spermatiques, nous allons rapporter les principales observations qu’on a faites sur ce sujet.

Leeuwenhoek ayant observé la semence du coq y vit des animaux semblables par la figure aux anguilles de rivière, mais si petits qu’il prétend que cinquante mille de ces animalcules n’égalent pas la grosseur d’un grain de sable ; dans la semence du rat, il en faut plusieurs milliers pour faire l’épaisseur d’un cheveu, etc. Cet excellent observateur était persuadé que la substance entière de la semence n’est qu’un amas de ces animaux ; il a observé ces animalcules dans la semence de l’homme, des animaux quadrupèdes, des oiseaux, des poissons, des coquillages, des insectes ; ceux de la semence de la sauterelle sont longuets et fort menus ; ils paraissent attachés, dit-il, par leur extrémité supérieure, et leur autre extrémité, qu’il appelle leur queue, a un mouvement très vif, comme serait celui de la queue d’un serpent dont la tête et la partie supérieure du corps seraient immobiles. Lorsqu’on observe la semence dans des temps où elle n’est pas encore parfaite, par exemple, quelque temps avant que les animaux cherchent à se joindre, il prétend avoir vu les mêmes animalcules, mais sans aucun mouvement, au lieu que, quand la saison de leurs amours est arrivée, ces animalcules se remuent avec une grande vivacité.

Dans la semence de la grenouille mâle il les vit d’abord imparfaits et sans mouvement, et quelque temps après il les trouva vivants ; ils sont si petits qu’il en faut, dit-il, dix mille pour égaler la grosseur d’un seul œuf