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de Montélimar, dont les plus gros sont des masses de basalte entraînées, comme les morceaux de tripoli, par le mouvement des eaux.

Par cet exposé, et d’après les faits observés par MM. Faujas de Saint-Fond et Fougeroux de Bondaroy[1], on ne peut guère douter que le tripoli ne doive son origine à la décomposition des pierres quartzeuses ou roches vitreuses, mêlées de fer par l’action des éléments humides qui les auront divisées, sans ôter à ces particules vitreuses leur ancienne dureté.


PIERRES PONCES

M. Daubenton a remarqué et reconnu le premier que les pierres ponces étaient composées de filets d’un verre presque parfait, et M. le chevalier de Dolomieu a fait de très bonnes observations sur l’origine et la nature de cette production volcanique ; il a observé, dans ses voyages, que l’île de Lipari est l’immense magasin qui fournit les pierres ponces à toute l’Europe, que plusieurs montagnes de cette île en sont entièrement composées : il dit qu’on les trouve en morceaux isolés dans une poudre blanche, farineuse, et qui n’est elle-même qu’une ponce pulvérulente.

La substance de ces pierres, surtout des plus légères, est dans un état de fritte très rapproché d’un verre parfait : leur tissu est fibreux, leur grain rude et sec, elles paraissent luisantes et soyeuses, et elles sont beaucoup plus légères que les laves poreuses ou cellulaires.

Cet illustre observateur distingue quatre espèces de ponces qui diffèrent entre elles par le grain plus ou moins serré, par la pesanteur, par la contexture et par la disposition des pores.

« Les pierres ponces, dit-il, paraissent avoir coulé à la manière des laves, avoir formé, comme elles, de grands courants que l’on retrouve à différentes profondeurs, les uns au-dessus des autres, autour du groupe des montagnes du centre de Lipari… Les pierres ponces pesantes occupent la partie inférieure des courants ou massifs, les pierres légères

    cailloux de tripoli, des corps marins. On voit, dans le Cabinet de M. le marquis de Grollier, au Pont-Din, non loin de Lyon, un bel oursin changé en tripoli dans une pierre roulée de la même matière, que nous trouvâmes en examinant ensemble les cailloux roulés des environs de Montélimar, parmi lesquels on voit des masses très curieuses de basalte, qu’une irruption diluvienne a transportées du Vivarais, éloigné d’une lieue de là, de l’autre côté du Rhône. Recherches sur les volcans éteints, par M. Faujas de Saint-Fond, p. 262. — « Les pierres des environs de Menat, dit M. de Bondaroy, celles de Poligné, près des carrières où se trouve le tripoli, sont schisteuses et plus ou moins rouges… Ces pierres, particulièrement dans la carrière de Poligné, annoncent le feu qui y a passé ; elles sont réduites en écume plus ou moins légère, ce sont de vraies pierres brûlées : rien ne peut laisser d’incertitude sur le feu qui a été aux environs de cette carrière ; des pierres ont été fondues, et on ne trouve le tripoli qu’aux environs de l’endroit où la présence du volcan est plus apparente. À Poligné, la partie de la carrière qu’on a choisie, de préférence pour l’usage, semble à la vérité avoir été lavée par les eaux et s’être formée du dépôt des parties les plus légères et les plus fondues. C’est aussi le sentiment de M. Guettard, mais c’est la même pierre qui a souffert, comme les voisines, la chaleur du feu souterrain : outre les pierres brûlées qui dénotent l’effet des feux souterrains, M. Grangier a retiré du tripoli de Menat en Auvergne, du soufre et du fer. J’ai obtenu de celui de Poligné du soufre et de l’alun, que l’on sait être des produits de volcan. » Sur la pierre appelée tripoli, par M. Fougeroux de Bondaroy, Académie des sciences, année 1769, p. 272 et suiv.

  1. Voyez la note précédente.