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vitrifiées par la violence du feu : ce sont des cailloux[1], des agates, des hyacinthes, des chrysolithes, des grenats, etc., qui tous ont conservé leur forme et souvent leur couleur. Quelques observateurs ont pensé que ces pierres renfermées dans les laves, même les plus dures, ne pouvaient être que des stalactites de ces mêmes laves, qui s’étaient formées dans leurs petites cavités intérieures longtemps après leur refroidissement, en sorte qu’elles en tiraient immédiatement leur origine et leur substance[2] ; mais ces pierres, bien examinées et comparées, ont été reconnues pour de vrais cailloux, cristaux, hyacinthes, chrysolithes et grenats, qui tous étaient formés précédemment et qui ont seulement été saisis par la lave en fusion lorsqu’elle roulait sur la surface de la terre, ou qu’elle coulait dans les fentes des rochers hérissés de ces cristaux : elle les a pour ainsi dire ramassés en passant, et ils se sont trouvés enveloppés, plutôt qu’interposés dans la substance de ces laves dès le temps qu’elles étaient en fusion.

M. Faujas de Saint-Fond nous a donné une bonne description très détaillée des chrysolithes qu’il a trouvées dans les basaltes et laves des anciens volcans du Vivarais[3] ; il ne

  1. Il est à propos de remarquer que, dans beaucoup de cantons volcaniques du Vicentin, du Véronais, etc., il se trouve, au milieu de la lave et de la cendre, différentes espèces de cailloux qui font feu avec l’acier, tels que des jaspes, des pierres à fusil, des agates rouges, noires, blanches, verdâtres et de plusieurs autres couleurs. M. Arduini a décrit séparément, dans le Giornale d’Italia, des hyacinthes, des chrysolithes et des pietre obsidiane qu’on trouve à Leonedo. On voit encore dans les collines du Vicentin, qui sont formées de cendres volcaniques, des cailloux de la nature des calcédoines ou des opales (opali enhydri), qui contiennent de l’eau. Lettres sur la Minéralogie, par M. Ferber, traduites par M. le baron de Diétrich, p. 72 et 73.
  2. Idem, p. 81, 82, 218 et suiv.
  3. « J’appelle cette pierre chrysolithe des volcans, parce qu’elle se trouve abondamment dans les laves et dans certains basaltes : elle est en grains irréguliers ou en petits fragments, qui ont la couleur, la dureté et les autres caractères de la véritable chrysolithe… La chrysolithe des volcans est en général plus pesante que la basalte, elle donne des étincelles lorsqu’on la frappe avec le briquet. On en trouve dans les basaltes de Maillas, non loin de Saint-Jean-le-Noir, dont les grains sont si adhérents qu’ils paraissent ne former qu’un seul et même corps. J’en ai fait scier et polir des morceaux qui pèsent quatre livres ; ils sont d’une grande dureté, et ont pris un poli assez vif, mais un peu étonné à cause de leur contexture formée par la réunion d’une multitude de grains, qui, quoique fortement liés, ne font pas cependant un ensemble, un tout parfait.

    » Cette substance est des plus réfractaires ; le feu des volcans ne lui a occasionné aucun changement sensible ; j’ai des laves du cratère de Monthrul, réduites en scories, qui contiennent de la chrysolithe qui n’a souffert aucune altération.

    » On trouve, dans le basalte de Maillas, la chrysolithe en fragments irréguliers ou en noyaux arrondis ; il y en a des morceaux qui pèsent jusqu’à huit ou dix livres ; plusieurs paraissent avoir été usés et arrondis par l’eau avant d’avoir été pris dans les laves.

    » J’ai de la chrysolithe en table d’un pouce d’épaisseur sur quatre pouces de longueur et deux pouces de largeur ; elle se trouve dans une belle lave poreuse bleue du cratère de Montbrul.

    » La chrysolithe des volcans est composée d’un assemblage de grains sablonneux, plus ou moins fins, plus ou moins adhérents, raboteux, irréguliers, quelquefois en espèce de croûte ou petites écailles graveleuses, mais le plus souvent en fragments anguleux qui s’engrènent les uns dans les autres ; la couleur de ces grains est variée, les uns sont d’un vert d’herbe tendre, d’autres d’un vert tirant sur le jaune, couleur de la véritable chrysolithe ; quelques-uns sont d’un jaune de topaze ; certains d’une couleur noire luisante, semblable à celle du schorl ; de sorte que dans l’instant on croit y reconnaître cette substance ; mais en prenant au soleil le vrai jour de ces grains noirs, et en les examinant dans tous les sens, on s’aperçoit que cette couleur n’est due qu’à un vert noirâtre qui produit cette teinte sombre et foncée.