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convexes à leur surface[1]. Ce savant naturaliste a aussi observé que la précision géométrique de la figure ne se trouve pas plus dans l’octaèdre du diamant que dans les autres cristallisations, et qu’il y a plus de diamants irréguliers que de régulièrement octaèdres, et que non seulement la figure extérieure de la plupart des diamants est sujette à varier, mais qu’il y a aussi des diamants dont la structure intérieure est irrégulière[2].

Les caractères que l’on voudrait tirer des formes de la cristallisation seront donc toujours équivoques, fautifs, et nous devons nous en tenir à ceux de la densité, de la dureté, de l’homogénéité, de la fusibilité et de la combustibilité, qui sont non seulement les vrais caractères, mais même les propriétés essentielles de toute substance, sans négliger néanmoins les qualités accidentelles, comme celles de se cristalliser plus ordinairement sous telle ou telle forme, de s’imbiber de la lumière, de perdre ou d’acquérir la couleur par l’action du feu, etc.

Le diamant, quoique moins dense que le rubis, la topaze et le saphir[3], est néanmoins plus dur ; il agit aussi plus puissamment sur la lumière qu’il reçoit, réfracte et réfléchit beaucoup plus fortement : exposé à la lumière du soleil ou du jour, il s’imbibe de cette lumière et la conserve pendant quelque temps ; il devient aussi lumineux lorsqu’on le chauffe ou qu’on le frotte contre toute autre matière[4] ; il acquiert plus de vertu électrique

  1. On aperçoit, sur chacune des huit faces du diamant brut, trois lignes qui sont renflées comme de petites veines, et qui s’étendent chacune depuis l’un des angles du triangle jusqu’au milieu des côtés opposés, ce qui forme six petits triangles dans le grand, en sorte qu’il y a quarante-huit compartiments sur la surface entière du diamant brut, que l’on peut réduire à vingt-quatre, parce que les compartiments qui sont de chaque côté des arêtes du diamant brut ne sont pas séparés l’un de l’autre par une pareille arête, mais simplement par une veine ; ces veines sont les jointures de l’extrémité des lames dont le diamant est composé. Le diamant est en effet formé de lames qui se séparent et s’exfolient par l’action du feu.

    Le fil du diamant est le sens dans lequel il faut le frotter pour le polir ; si on le frottait à contresens, les lames qui sont superposées les unes sur les autres, comme les feuillets d’un livre, se replieraient ou s’égrèneraient, parce qu’elles ne seraient pas frottées dans le sens qu’elles sont couchées les unes sur les autres.

    Pour polir le diamant, il ne suffit pas de suivre le sens des lames superposées les unes sur les autres, en les frottant du haut en bas, mais il faut encore suivre la direction des fibres dont ces mêmes lames sont composées : la direction de ces fibres est parallèle à la base de chaque triangle, en sorte que, lorsqu’on veut polir à la fois deux triangles des quarante-huit dont nous avons parlé, et suivre en même temps le fil du diamant, il faut diriger le frottement en deux sens contraires, et toujours parallèlement à la base de chaque triangle.

    Chaque lame est pliée en deux parties égales pour former une arête de l’octaèdre, et, par la superposition des unes sur les autres, ces lames ne peuvent recevoir le poli que dans le sens où le frottement se fait de haut en bas du triangle, c’est-à-dire en passant successivement d’une lame plus courte à une lame plus longue. (Note communiquée par M. Daubenton.)

  2. Lorsque cette irrégularité est grande, les diamantaires ne peuvent suivre aucune règle pour les polir, et c’est ce qu’ils appellent diamants de nature, qu’ils ne font qu’user et échauffer sans les polir, parce que les lames étant irrégulièrement superposées les unes sur les autres, elles ne présentent aucun sens continu dans lequel on puisse les frotter. — On ne peut juger les diamants que lorsque leurs surfaces sont naturellement brillantes, ou lorsqu’on les a polis par l’art. (Suite de la note communiquée par M. Daubenton.)
  3. La pesanteur spécifique du rubis d’Orient est de 42 833 ; celle de la vermeille est de 42 299 ; celle de la topaze d’Orient, de 40 106 ; celle du saphir d’Orient bleu, de 39 941 ; du saphir blanc, de 39 811 ; et la pesanteur spécifique du diamant oriental n’est que de 25 212.
  4. Si l’on frotte légèrement le diamant dans l’obscurité avec le doigt ou un morceau d’étoffe de laine ou de soie, tout son corps paraît lumineux : bien plus, si, après l’avoir frotté, on le présente à l’œil, il conserve sa lumière pendant quelque temps. Dictionnaire encyclopédique de Chambers, article Diamant,