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Les bancs des carrières à plâtre, quoique superposés horizontalement, ne suivent pas la loi progressive de dureté et de densité qui s’observe dans les bancs calcaires : ceux de plâtre sont même souvent séparés par des lits interposés de marne, de limon, de glaise, et chaque banc plâtreux est pour ainsi dire de différente qualité, suivant la proportion de l’acide mêlé dans la substance calcaire. Il y a aussi beaucoup de plâtres imparfaits, parce que la matière calcaire est très souvent mêlée avec quelque autre terre, en sorte qu’on trouve assez communément un banc de très bon plâtre entre deux bancs de plâtre impur et mélangé.

Au reste, le plâtre cru le plus blanc ne l’est jamais autant que le plâtre calciné, et tous les gypses ou stalactites de plâtre, quoique transparents, sont toujours un peu colorés, et ne deviennent très blancs que par la calcination ; cependant l’on trouve en quelques endroits le gypse d’un blanc transparent dont nous avons parlé, et auquel on a donné improprement le nom d’albâtre.

Le gypse est le plâtre le plus pur, comme le spath est aussi la pierre calcaire la plus pure : tous deux sont des extraits de ces matières, et le gypse est peut-être plus abondant proportionnellement dans les bancs plâtreux, que le spath ne l’est dans les bancs calcaires ; car on trouve souvent entre les lits de pierre à plâtre des couches de quelques pouces d’épaisseur de ce même gypse transparent et de figure régulière ; les fentes perpendiculaires ou inclinées, qui séparent de distance à autre les blocs des bancs de plâtre, sont aussi incrustées et quelquefois entièrement remplies de gypse transparent et formé de filets allongés. Et il paraît en général qu’il y a beaucoup moins de stalactites opaques dans les plâtres que dans les pierres calcaires.

Les plâtres colorés, gris, jaunes ou rougeâtres, sont mélangés de parties minérales : la craie ou la pierre blanche réduite en poudre aura formé les plus beaux plâtres ; la marne qui est composée de poudre de pierre, mais mélangée d’argile ou de terre limoneuse, n’aura pu former qu’un plâtre impur et grossier, plus ou moins coloré suivant la quantité de ces mêmes terres[1]. Aussi voit-on dans les carrières plusieurs bancs de plâtres imparfaits, et le bon plâtre se fait souvent chercher bien au-dessous des autres.

Les couches de plâtre, comme celles de craie, ne se trouvent pas sous les couches des pierres dures ou des rochers calcaires ; et ordinairement les collines à plâtre ne sont composées que de petit gravier calcaire, de tuffeau, qu’on doit regarder comme une poussière de pierre, et enfin de marne, qui n’est aussi que de la poudre de pierre mêlée d’un peu de terre. Ce n’est que dans les couches les plus basses de ces collines, et au-dessous de tous les plâtres, qu’on trouve quelquefois des bancs calcaires avec des impressions de

    dans la mine de Kupferberg près d’Andrarum, entremêlé de couches d’ardoise et de pyrites, et qu’à Westersilberberg on le rencontre avec du vitriol blanc ; 3o  que l’acide vitriolique est le seul des trois acides minéraux qui puisse donner à la terre calcaire la propriété de prendre corps et de se durcir avec l’eau, après avoir été légèrement calcinée, car l’acide de sel marin, en dissolvant la chaux, forme ce qu’on appelle (très improprement) le sel ammoniac fixe. Pour l’acide du nitre, il n’a point encore été trouvé dans le règne minéral : il faut conclure de là que la nature, dans la formation du gypse, emploie les mêmes matières que l’art ; cependant la combinaison qu’elle fait paraît bien plus parfaite. » Expériences sur le gypse dans un recueil de Mémoires sur la Chimie, traduit de l’allemand ; Paris, 1764, t. II, p. 337 et suiv.

  1. « On croirait, dit M. Bowles, que les feuilles d’argile, mêlées avec la terre calcaire, que l’on trouve souvent étendue sur le plâtre, en sont de véritables couches, mais cela n’est pas : elles sont de cette façon, parce que le temps de leur destruction n’est pas encore arrivé, et le plâtre est dans cet endroit plus nouveau que l’argile mêlée de terre calcaire, que je trouvai, par des expériences, être un plâtre imparfait. » Hist. naturelle d’Espagne, p. 192.