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Avant d’avoir commandé tous ces globes d’un pouce de diamètre, j’avais exposé à un même degré de feu une masse carrée de fer, et une autre de plomb de deux pouces dans toutes leurs dimensions, et j’avais trouvé, par des essais réitérés, que le plomb s’échauffait plus vite, et se refroidissait en beaucoup moins de temps que le fer. Je fis la même preuve sur le cuivre rouge : il faut aussi plus de temps pour l’échauffer et pour le refroidir qu’il n’en faut pour le plomb, et moins que pour le fer. En sorte que, de ces trois matières, le fer me parut celle qui est la moins accessible à la chaleur, et en même temps celle qui la retient le plus longtemps. Ceci me fit connaître que la loi du progrès de la chaleur, c’est-à-dire de son entrée et de sa sortie dans les corps, n’était point du tout proportionnelle à leur densité, puisque le plomb, qui est plus dense que le fer et le cuivre, s’échauffe néanmoins et se refroidit en moins de temps que ces deux autres métaux. Comme cet objet me parut important, je fis faire mes petits globes pour m’assurer plus exactement, sur un grand nombre de différentes matières, du progrès de la chaleur dans chacune. J’ai toujours placé les globes à un pouce de distance les uns des autres devant le même feu ou dans le même four, deux ou trois, ou quatre, ou cinq, etc., ensemble, pendant le même temps avec un globe d’étain au milieu des autres. Dans la plupart des expériences, je les laissais exposés à la même action du feu jusqu’à ce que le globe d’étain commençait à fondre, et dans ce moment on les enlevait tous ensemble et on les posait sur une table dans de petites cases préparées pour les recevoir ; je les y laissais refroidir sans les bouger, en essayant assez souvent de les toucher, et au moment qu’ils commençaient à ne plus brûler les doigts, et que je pouvais les tenir dans ma main pendant une demi-seconde, je marquais le nombre des minutes qui s’étaient écoulées depuis qu’ils étaient retirés du feu ; ensuite je les laissais tous refroidir au point de la température actuelle, dont je tâchais de juger par le moyen d’autres petits globes de même matière qui n’avaient pas été chauffés, et que je touchais en même temps que ceux qui se finissaient. De toutes les matières que j’ai mises à l’épreuve, il n’y a que le soufre qui fond à un moindre degré de chaleur que l’étain ; et malgré la mauvaise odeur de sa vapeur je l’aurais pris pour terme de comparaison, mais comme c’est une matière friable et qui se diminue par le frottement, j’ai préféré l’étain, quoiqu’il exige près du double de chaleur pour se fondre, de celle qu’il faut pour fondre le soufre.


I. Par une première expérience, le boulet de plomb et le boulet de cuivre, chauffés pendant le même temps, se sont refroidis dans l’ordre suivant :

Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. Refroidis à la température actuelle.
Minutes. Minutes.
Plomb, en 08 0/2 En 23
Cuivre, en 12 0/2 En 35


II. Ayant fait chauffer ensemble, au même feu, des boulets de fer, de cuivre, de plomb, d’étain, de grès et de marbre de Montbard, ils se sont refroidis dans l’ordre suivant :

Refroidis à les tenir pendant une demi-seconde. Refroidis à la température actuelle.
Minutes. Minutes.
Étain, en 06 1/2 En 16
Plomb, en 08 0/2 En 17
Grès, en 09 0/2 En 19
Marbre commun, en 10 0/2 En 21
Cuivre, en 11 1/2 En 30
Fer, en 13 0/2 En 38