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plus fin, plus serré que celui du meilleur acier après la plus forte trempe, auquel il ressemblait d’ailleurs par la couleur.

» 6o Quelques portions de ce bouton, ainsi réduites en parcelles à coups de marteau sur le tas d’acier, nous leur avons présenté l’aimant, et aucune n’a été attirée ; mais les ayant encore pulvérisées dans un mortier d’agate, nous avons remarqué que le barreau magnétique en enlevait quelques-unes des plus petites toutes les fois qu’on le posait immédiatement dessus.

» Cette nouvelle apparition du magnétisme était d’autant plus surprenante, que les grains détachés de la masse agglutinée de la deuxième expérience nous avaient paru avoir perdu eux-mêmes toute sensibilité à l’approche et au contact de l’aimant ; nous reprîmes en conséquence quelques-uns de ces grains, ils furent de même réduits en poussière dans le mortier d’agate, et nous vîmes bientôt les parties les plus petites s’attacher sensiblement au barreau aimanté ; il n’est pas possible d’attribuer cet effet au poli de la surface du barreau ni à aucune autre cause étrangère au magnétisme : un morceau de fer aussi poli, appliqué de la même manière sur les parties de ce platine n’en a jamais pu enlever une seule.

» Par le récit exact de ces expériences et des observations auxquelles elles ont donné lieu, on peut juger de la difficulté de déterminer la nature du platine ; il est bien certain que celui-ci contenait quelques parties vitrifiables, et vitrifiables même sans addition à un grand feu ; il est bien sûr que tout platine contient du fer et des parties attirables ; mais si l’alcali prussien ne donnait jamais du bleu qu’avec les grains que l’aimant a enlevés, il semble qu’on en pourrait conclure que ceux qui lui résistent absolument sont du platine pur, qui n’a par lui-même aucune vertu magnétique, et que le fer n’en fait pas partie essentielle. On devait espérer qu’une fusion aussi avancée, une coupellation aussi parfaite, décideraient au moins cette question ; tout annonçait qu’en effet ces opérations l’avaient dépouillé de toute vertu magnétique en le séparant de tous corps étrangers ; mais la dernière observation prouve, d’une manière invincible, que cette propriété magnétique n’y était réellement qu’affaiblie, et peut-être masquée ou ensevelie, puisqu’elle a reparu lorsqu’on l’a broyé.

REMARQUES.

De ces expériences de M. de Morveau, et des observations que nous avons ensuite faites ensemble, il résulte :

1o Qu’on peut espérer de fondre le platine sans addition dans nos meilleurs fourneaux, en lui appliquant le feu plusieurs fois de suite, parce que les meilleurs creusets ne pourraient résister à l’action d’un feu aussi violent, pendant tout le temps qu’exigerait l’opération complète ;

2o Qu’en le fondant avec le plomb, et le coupellant successivement et à plusieurs reprises, on vient à bout de vitrifier tout le plomb, et que cette opération pourrait à la fin le purger d’une partie des matières étrangères qu’il contient ;

3o Qu’en le fondant sans addition, il paraît se purger lui-même en partie des matières vitrescibles qu’il renferme, puisqu’il s’élance à sa surface de petits jets de verre qui forment des masses assez considérables, et qu’on en peut séparer aisément après le refroidissement ;

4o Qu’en faisant l’expérience du bleu de Prusse avec les grains de platine qui paraissent les plus insensibles à l’aimant, on n’est pas toujours sûr d’obtenir de ce bleu, comme cela ne manque jamais d’arriver avec les grains qui ont plus ou moins de sensibilité au magnétisme ; mais comme M. de Morveau a fait cette expérience sur une très petite quantité de platine, il se propose de la répéter ;