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accompagnées de la terre rouge, qui souvent traverse les veines de la mine, ou bien est appliquée contre les parois des rochers calcaires qui la renferment. Et ce qui prouve d’une manière évidente que ces dépôts de mines se sont faits par le mouvement des eaux, c’est qu’après avoir vidé les fentes et cavités qui les contiennent, on voit, à ne pouvoir s’y tromper, que les parois de ces fentes ont été usées et même polies par l’eau, et que par conséquent elle les a remplies et baignées pendant un assez long temps avant d’y avoir déposé la mine de fer, les petits cailloux, le sable vitrescible et la terre limoneuse, dont ces fentes sont actuellement remplies ; et l’on ne peut pas se prêter à croire que les grains de fer se soient formés dans cette terre limoneuse depuis qu’elle a été déposée dans ces fentes de rochers : car une chose tout aussi évidente que la première s’oppose à cette idée, c’est que la quantité des mines de fer paraît surpasser de beaucoup celle de la terre limoneuse. Les grains de cette substance métallique ont à la vérité tous été formés dans cette même terre, qui n’a elle-même été produite que par le résidu des matières animales et végétales, dans lequel nous démontrerons la production du fer en grains ; mais cela s’est fait avant leur transport et leur dépôt dans les fentes des rochers. La terre limoneuse, les grains de fer, le sable vitrescible et les petits cailloux ont été transportés et déposés ensemble ; et si depuis il s’est formé dans cette même terre des grains de fer, ce ne peut être qu’en petite quantité. J’ai tiré de chacune de ces mines plusieurs milliers de tonneaux, et, sans avoir mesuré exactement la quantité de terre limoneuse qu’on a laissée dans ces mêmes cavités, j’ai vu qu’elle était bien moins considérable que la quantité de la mine de fer dans chacune.

Mais ce qui prouve encore que ces mines de fer en grains ont été toutes amenées par le mouvement des eaux, c’est que dans ce même canton, à trois lieues de distance, il y a une assez grande étendue de terrain formant une espèce de petite plaine, au-dessus des collines calcaires, et aussi élevée que celles dont je viens de parler, et qu’on trouve dans ce terrain une grande quantité de mine de fer en grains, qui est très différemment mélangée et autrement située : car au lieu d’occuper les fentes perpendiculaires et les cavités intérieures de rochers calcaires, au lieu de former un ou plusieurs sacs perpendiculaires, cette mine de fer est au contraire déposée en nappe, c’est-à-dire par couches horizontales, comme tous les autres sédiments des eaux ; au lieu de descendre profondément comme les premières, elle s’étend presque à la surface du terrain, sur une épaisseur de quelques pieds ; au lieu d’être mélangée de cailloux et de sable vitrescible, elle n’est au contraire mêlée partout que de graviers et de sables calcaires. Elle présente de plus un phénomène remarquable : c’est un nombre prodigieux de cornes d’Ammon et d’autres anciens coquillages, en sorte qu’il semble que la mine entière en soit composée, tandis que dans les huit autres mines dont j’ai parlé ci-dessus, il n’existe pas le moindre vestige de coquilles, ni même